• D'abord l'humain!

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    Nous publions la contribution d'un internaute sur un sujet qui mérite une grande réflexion et une vigilance de tous les instants, en l'occurrence celui du négationnisme. Surtout dans une période caractérisée par une réminiscence des idées de l'extrême droite et la montée de tous les obscurantismes. "La bête immonde", comme la caractérisait Berthold Brecht, n'est pas morte.

    "Le  vote de la loi sur la pénalisation des génocides reconnus par la France aura révélé que les négationnistes peuvent toujours compter sur les affairistes toujours prêts à toutes les compromissions pour perpétuer le silence et ne pas décourager le négationnisme. Le pire est que, parmi eux, se trouvent des intellectuels bien pensants soi disant humanistes et même de gauche. D’aucuns vont jusqu’à craindre la reconnaissance du génocide rwandais dans lequel la France et la Belgique ont joué un rôle condamnable par leurs liens avec les génocidaires. D’autres voudraient renvoyer le génocide arménien dans les oubliettes comme celui des Amérindiens. Les partisans du compromis politique laissent faire et voudraient maintenant que l’opinion publique oublie. Cela ne nous regarde plus ! Pourtant le négationniste est un bourreau au même titre que l’auteur du génocide. Il continue à torturer les rescapés. Il perpétue le crime impuni. Il a ses activistes prêts à la violence et à tuer encore. Rappelons nous ne serait-ce que de Hrant Dink. « La négation apparaît clairement comme la poursuite du crime de génocide par d’autres moyens. Il est donc tout à fait normal de pénaliser le négationnisme », nous dit Yves Ternon, historien auteur de travaux sur le génocide arménien.

    En ne punissant pas le négationnisme, on laisse le champ libre à la haine et aux bourreaux d’aujourd’hui et de demain. Les négationnistes abusent de la liberté d’expression et ceux qui les laissent faire sont leurs complices. Nous avons entendu des adversaires de la loi de pénalisation marteler des slogans comme «  Le parlement n’est pas un tribunal », « la loi sur la pénalisation du négationnisme est une atteinte aux libertés fondamentales ». Elle serait inconstitutionnelle… L’argutie ultime a été lancée par Robert Badinter avec tout le poids de son influence. Elle est ensuite reprise en écho par tous les lobbyistes de la grande Turquie.  Il est facile de jeter des affirmations. Il est douloureux de ne pas être entendu lorsque l’on donne des explications comme l’ont fait des élus favorables à la loi et les victimes du négationnisme. Le vote de la loi contre les négationnismes reconnus par la France (et donc historiquement prouvés) est juste. Il offre une sépulture inviolable aux victimes (pour reprendre le commentaire d’un élu marseillais) Cette loi répond non seulement à une nécessité juridique française mais elle a aussi une portée universelle. Ses adversaires doivent, pour être cohérents, dire ouvertement qu’ils sont favorables au négationnisme comme digne de la liberté d’expression et que, pour eux, il n’est pas une violence intolérable faite à des victimes. Ils doivent dire ouvertement que l’histoire ne sert à rien et que le législateur doit alors n’en tirer aucune loi juste pour ne pas nuire à des relations diplomatiques avec un état négationniste et autoritaire. Ils doivent ouvertement dire qu’ils seraient négationnistes eux-mêmes si on les accusait des génocides arménien, amérindien, rwandais, cambodgien… ou d’autres crimes contre l’humanité qui malheureusement se multiplient en ce bas monde. La loi est votée contre les atteintes outrancières à la reconnaissance des génocides. Elle laisse pourtant libre cours aux négationnistes rampants contre lesquels ne peut s’opposer que leur conscience, si toutefois ils en font preuve… Cela ne suffit pas à des élus qui vont à l’encontre des votes de leurs deux assemblées. Ils jettent ainsi le  discrédit sur leurs propres institutions et sur la démocratie. En mauvais perdants, ils font l’ultime recours, l’ultime injure à des victimes, la dernière allégeance à un Etat étranger négationniste et autoritaire, la nouvelle possibilité (pensent-ils) de faire du lobbying lorsque l’on connaît l’existence de cercles franco-turcs dans lesquels on retrouve les adversaires de cette loi. Pour exemple l’Institut du Bosphore, créé en 2009 par le patronat turc et dans lequel on trouve les adversaires les plus acharnés à la reconnaissance du génocide arménien et à sa pénalisation, et parmi eux, des élus de tous bords: Alain Juppé, François Copé, Catherine Tasca, Michel Rocard, Pierre Moscovici… associés à des patrons français et turcs.  On y remarque la présence aussi d’un négationniste notoire du génocide arménien, l’historien Gilles Veinstein et de lobbyistes de la grande Turquie comme le journaliste Alexandre Adler. L’humain d’abord ! Pas les affaires !...

    Il apparaît de plus en plus que la loi Boyer fait l’objet d’un acharnement de la part d’élus manipulés par des lobbyistes turcs et français. Certains de ces élus ont une forte communauté turque dans  leurs fiefs comme le sénateur du Loiret Jean-Pierre SUEUR, adversaire à la loi sourd à toute argumentation favorable à la loi. Rapporteur, pour la commission des lois du Sénat, de la proposition de loi visant à réprimer la négation ou la contestation outrancière des génocides, le 23 janvier en séance publique, il a présenté son rapport lors d’une intervention en séance, puis une exception d’irrecevabilité (tendant à montrer que le texte est inconstitutionnel). Il a fortement influencé la commission ayant opté pour son irrecevabilité et sa voix a été prépondérante. La ville d’Orléans est une commune  sur laquelle on trouve un centre culturel turc et une mosquée turque. Jean-Pierre Sueur a été conseiller municipal d'Orléans de 1983 à 1989 et de 2001 à 2008. Il a été élu Maire d'ORLEANS en 1989, réélu en 1995. Il fait partie de ceux qui cumulent les fonctions électives que nous n’énumérerons pas ici, tant la liste est longue.

    Il faudrait faire une enquête sur les motivations de chaque adversaire de la loi Boyer. On note qu’à l’UMP, on y trouve la partie la plus à droite menée par le député réactionnaire Jacques MYARD, un proche du FN  connu pour son « non à la repentance » en ce qui concerne le Rwanda. L’argumentation fallacieuse des plus connus montrent que leurs motivations ne sont pas dites clairement et donc sont inavouables. Certains en arrivent à opposer la Shoah et le génocide arménien pour ne pas remettre en cause la loi Gayssot qui n’a jamais été examinée par la Conseil constitutionnel malgré des oppositions affichées lors de son vote. Comment défendre la loi Gayssot en attaquant la loi Boyer ? Un exercice auquel se livre Robert Badinter mais qui ne trompe personne. Son nom sert de caution aux négationnistes turcs. Pas de quoi pavaner ! Maître Robert Badinter ne s’est pas montré au Sénat. Il n’a pas signé le recours devant le Conseil constitutionnel. Il a fait un peu comme le serpent qui s’enfuit après avoir inoculé son venin. C’est le venin qui agit par la suite chez ceux qui font de l’opposition à la loi une posture purement intellectuelle, reflet de l’ignorance et du désintérêt sur un sujet aussi grave que les génocides. Maître Badinter aime donner des leçons sur les droits de l’homme lorsqu’il déclarait : « La pensée occidentale a engendré les droits de l’homme dans sa version des Lumières. Je rappelle que les plus grands progrès scientifiques sont le fruit de la pensée occidentale liés à la séparation de la science et de l’idée de Révélation divine à partir du XVe siècle et au triomphe de la Raison au XVIIIe siècle. Les droits de l’homme, c’est une certaine conception du monde et de l’homme. « Tous les hommes naissent libres et égaux » : c’est une affirmation de principe, contestée par les sociétés racistes, qui voue l’Occident à l’universalisme. Mais aujourd’hui, à l’opposition « droits bourgeois »/ « droits socialistes » d’il y a cinquante ans a succédé un nouveau conflit entre deux conceptions des droits de l’homme : la nôtre, universaliste, et l’autre, relativiste ou multiculturaliste qui autorise les Etats à définir selon leurs critères leurs droits de l’homme… » Aujourd’hui, il estime que la lutte contre le négationnisme n’est universelle qu’en ce qui concerne la Shoah. Et il a ajouté sur son blog : « Les Présidents successifs de la République aiment à rappeler que la France est la patrie des droits de l’homme. C’est de l’auto-proclamation. La vérité historique est que la France est la patrie de la Déclaration des droits de l’homme, ce qui n’est pas la même chose ! A nous de faire en sorte que la réalité soit conforme à la Déclaration. Nous en sommes encore loin… » A qui la faute aujourd’hui ?

    Lorsque l’on se plonge dans les archives du Sénat, on découvre le voyage fait par la sénatrice Catherine Tasca en Turquie. Une communication datée de 2009 révèle les vraies raisons de son combat contre la loi dite Boyer. Ce n’est absolument pas la défense de la liberté d’expression. Ce n’est pas son inconstitutionnalité. C’est le souhait que la Turquie entre dans l’Union européenne et la satisfaction d’avoir été bien reçue. Cette communication a fait l’objet d’un petit commentaire sur le négationnisme de l’Etat turc en évitant deux mots « négationnisme » et «  génocide ». Maître Badinter apporte par des commentaires son soutien à cette communication que nous vous invitons à lire en cliquant sur le surlignage jaune ci-dessus.

    Il nous fait évoquer aussi une sénatrice qui a hérité du siège de son défunt mari et qui, depuis lors, est une fervente représentante de l’Etat turc au Sénat. Partout où elle le peut, elle s’aligne sur les positions turques et même en ce qui concerne le conflit du Haut-Karabagh où elle est partie après le vote de la loi de pénalisation. Très hostile aux Arméniens et très proche des intérêts de l’Azerbaïdjan en France, la sénatrice Nathalie Goulet se rend à la tête d’un groupe de Sénateurs français qui avait voté contre la loi de pénalisation de la négation du génocide arménien. Le séjour prévu  va du 5 au 10 février sera sans aucun doute inoubliable et riche en collations offerts par un allié négationniste de la Turquie, l’autocrate azéri  Ilham Aliev, l’un des derniers dictateurs de la planète.

    En attendant et jusqu’à preuve du contraire, les Français d’origine arménienne ne peuvent que faire confiance en l’impartialité du Conseil constitutionnel, étant convaincu que la loi Boyer ne peut être invalidée comme non conforme à notre constitution. Les éminents membres de ce haut conseil ne devraient tenir compte de l’ingérence inacceptable d’un État étranger dans les affaires intérieures de la France que pour la refuser. Ils sauront prendre en compte la blessure profonde que le négationnisme inflige aux descendants des rescapés des génocides et des déportations mais aussi le caractère inacceptable de remise en cause de la protection de la mémoire des génocides reconnus par la France, des événements tragiques qui concernent l’humanité toute entière car il nous faut  la prévenir d’autres crimes de cette nature. Il serait lamentable qu’une loi votée par nos deux assemblées aille devant les instances européennes qui seront le seul recours envisageable immédiatement. Au fronton du Conseil constitutionnel se trouve un Sphinx qui fait référence à la mythologie grecque. Dans l’antiquité grecque,  la pesée de l'âme consiste à mettre le cœur du défunt sur une balance et de l'autre côté une plume (représentant la déesse Maât) ; si le cœur est plus léger (ce qui signifie que le cœur n'est pas entaché de péchés), le défunt peut rejoindre le royaume des morts. Sinon, il se fera dévorer par un monstre et son âme sera perdue à tout jamais. Le cœur de peuple arménien avec ses « tombes muettes comme l’abîme » est plus léger que la plume du négationnisme franco-turc. Les âmes des Arméniens massacrés ne seront ni dévorées ni perdues à tout jamais. La pénalisation du négationnisme leur offre une sépulture inviolable. Il ne faut pas la rouvrir à tous les mauvais vents du négationnisme.

    Il faut rappeler que cette loi de pénalisation ne vise pas le peuple turc mais le négationnisme de l’Etat turc avec ses relais activistes en France. En Turquie, la première loi de reconnaissance du génocide arménien a produit des effets positifs contrecarrés par l’assassinat de Hrant Dink. La nouvelle loi de pénalisation vient de produire les mêmes effets. Des Turcs peuvent prononcer en Turquie  le mot « génocide » sans être inquiétés pour le moment. Qu’en sera-t-il si la loi est invalidée ? Cette loi devrait permettre à la Turquie d’avancer vers une vraie démocratisation et non pas une simple apparence, une façade derrière laquelle il y a des arrestations d’intellectuels et de journalistes pour délit d’opinion. L’Etat turc nie le génocide arménien d’hier comme il nie aujourd’hui  l’existence du peuple kurde. Il a menti et continue à mentir à son peuple en s’enfermant dans le négationnisme, faisant le choix d’entrer dans l’union européenne par effraction, plutôt que d’emprunter la grande porte. Seule la communauté internationale peut pousser l’Etat turc sur la voie de la reconnaissance. Des pays comme la Suisse et la Croatie ont donné l’exemple en pénalisant les génocides. L’union européenne en a donné la directive. La France est donc bien dans le sens de l’histoire et non à contre-courant comme certains historiens veulent le faire croire. Ce vote n’est pas une affaire de partis politiques mais d’humanisme et de responsabilité citoyenne. C’est aussi devenu une affaire d’Etat à Etat dans laquelle l’image d’une France libre, souveraine et défendant les droits de l’homme est en jeu. D’abord l’humain ! D’abord l’humain !... Il faut le répéter sans cesse contre un pseudo humanisme de façade qui fait de l’inhumain un droit, une valeur morale."

     Signé: Pidone

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