• Gnagnagna pauvres réacs !

    Nous avons eu droit à la fausse expulsion du philosophe vindicatif Alain Finkielkraut et au récit embrouillé de l’actrice  Véronique  Genest qui a surtout exercé son art dans le rôle d'un commissaire de police. On se demande comment elle aurait pris son récit maladroit si le commissaire Julie Lescaut avait dû recueillir la plainte de la comédienne Véronique Genest ? Il suffit de l’écouter pour comprendre que la nuit debout n’a rien à voir avec une agression décrite avec un grand flou artistique. Véronique Genest rectifie un peu le tir, expliquant que ce n'est pas vraiment sur la place de la République qu'elle a été prise à partie, mais dans une rue adjacente, en face du théâtre en bas de chez elle. "Un mec m'a agressée, m'a dit que j'étais populiste", détaille l'actrice qui précise toutefois, qu'à l'inverse d'Alain Finkielkraut, elle ne s'est "pas fait cracher dessus". L’homme qui s’est reconnu dans les propos de Véronique Genest s’appelle Sylvain Frécon. Cet illustrateur a croisé la route de la star de la série “Julie Lescaut” le samedi 2 avril. Elle sortait du « Palais des glaces ».

    Dans plusieurs articles (Ici et Là), nous avons retrouvé la version de Sylvain Frécon qui n’est pas à l’avantage de la comédienne et n’a surtout rien à voir avec la nuit debout de la place de la République. On apprend que la nuit debout troublerait la tranquillité de la comédienne qui habite à proximité. Heureusement que Véronique Genest n’a pas déposé plainte car le commissaire Julie Lescaut aurait peut-être retenu l’accusation mensongère après une confrontation.

    Il reste que la presse et les politiciens ont immédiatement  récupéré l’émotion provoquée pour se livrer à une charge médiatique contre les Nuits debout de la place de la république. Violences des gauchistes, fascisme des antifascistes, bobos de gauche, zone de non-droit occupé par les zadistes … une avalanches de condamnations et de demandes d’interdictions, voire de dissolution des partis d’extrême-gauche, ont suivi le « gnagnagna, pauvre conne » et les élucubrations d’une comédienne connue pour son discours d’extrême-droite.

    Sarkozy a dû être rassuré par le vocabulaire employé par un académicien fraîchement adoubé par ses pairs. Le « gnagnagna » est une onomatopée envers une personne ennuyeuse qui se répète. Bien que l'Académie française ne soit pas ouverte aux onomatopées, le terme de "conne" choque davantage que "Gnagnagna" dans la bouche d'un académicien qui plus est philosophe donc en quête de sagesse. Heureusement qu’il n’avait pas son épée d’académicien, symbole des nombreux coups linguistiques dans l’eau donnés par cette maison de retraite dorée. On pourrait retourner parfois le "gnagnagna pauvre con" contre lui et c'est ce que ne manquent pas de faire des internautes. 

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    L’affaire Finkielkraut et Genest faisant « pshitt » ( si un académicien distingué use d’une interjection pourquoi pas nous), une affiche confectionnée par le service communication de la CGT a été une aubaine pour reporter le bashing sur ce vieux syndicat qui est de toutes les luttes sociales. Le prétexte était trop beau pour nos hiérarques de l’orthodoxie paléolibérale en guerre contre les acquis sociaux pour lesquels ce syndicat a toujours œuvré. Sus à la CGT ! Il aura suffit de cette affiche pour que le sang leur monte à la tête, pas celui des manifestants matraqués mais celui de la colère feinte accompagnant l’éloge d’une police en état d’urgence. L’affiche est volontairement provocante mais n’avait sans doute pas l’intention de vexer les policiers qui, dans leur majorité, font leur travail dans le respect des lois républicaines.  

    Les tirs médiatiques visent un syndicat en lutte contre la loi El Khomri d’autant plus qu’il va se réunir en congrès à Marseille et qu’il participe à l’action unitaire contre la contre-réforme du code du travail avec une nouvelle manifestation prévue le 28 avril prochain.

    Que nous montre l’affiche  qualifiée de « honteuse », « immonde », « abjecte » et j’en passe ? Gnagnagna pauvres réacs ! D’abord il faut parler de son intention qui n’intéresse pas ses détracteurs. Elle dénonce les violences policières qui ne répondaient à aucune violence contre les forces de l’ordre. Ces violences sont le plus souvent le fait d’individus et non pas de tous les policiers. Parfois elles sont dictées par des ordres. C’est plus grave. Que voit-on ? Une matraque et un insigne de CRS, près d’une flaque de sang, titrés : « La police doit protéger les citoyens et non les frapper. STOP à la violence !». Même si les images sont évocatrices et sans doute trop fortes pour certains, est-ce outrancier de le dire ? Où sont les accusations honteuses contre toute la police ? Sont-elles dans les yeux de ceux qui regardent une image sans lire le texte et voit rouge devant le logo CGT ?  

    Le Ministre de l’Intérieur s’est joint à la réprobation provoquée et orchestrée. Jean-Christophe Cambadélis s’est associé à Eric Ciotti en évoquant une « gauchisation » de la CGT. En voilà encore un qui donne des leçons à une gauche qu’il a trahi.

    Cette affiche peut pousser à la discussion sans être instrumentalisé pour devenir une campagne médiatique contre le CGT et au-delà contre le syndicalisme de lutte. On peut même dire qu'elle était inutile et qu'il suffit de dénoncer les violences policières avérées. 

    Toutefois, vu le climat social, la contestation contre la loi travail et les Nuits debout qui inquiètent la classe politique, toutes les ficelles médiatiques sont grosses, y compris les cri d'horreur contre une affiche qui, selon certains responsables de la CGT, n'était pas validée pour être diffusée.

    Certains policiers ont pris cette affiche comme jetant le discrédit sur chacun d’eux. C’est ce qu’on a voulu leur faire croire mais ce n’est pas ce que dit cette affiche. On peut la trouver trop provocatrice mais à qui la faute ? Doit-on laisser les violences policières commises impunies pour sauvegarder l’honneur de tous les policiers ?  Ou bien justement doit-on les punir pour chasser de l’institution les coupables violents et maintenir la confiance des citoyens de tous bords ? Ne doit-on plus s’interroger sur les usages abusifs du Flashball malgré les blessures qu’occasionne cette arme non létale jusqu’à provoquer des handicaps en attendant son premier mort ? Ne doit-on pas s’interroger sur l’usage abusif des grenades lacrymogènes après la mort du jeune zadiste Rémi Fraisse ?

    Voilà les vraies questions bien plus importantes que la mise en cause de la CGT à travers un affiche provocatrice certes mais pas au point de la qualifier de honteuse, immonde et abjecte en jouant sur les réactions corporatives des policiers, déjà mis sous pression par l’Etat d’urgence et le plan Vigipirate, et sur l’émotion des gens traumatisés par les risques d’attentat et la criminalité.

    Personnellement, nous n’aurions pas diffusé l'affiche, sachant les réactions qu'elle allait engendrer.  Il faut toutefois dénoncer les violences et l’inaction des pouvoirs publics lorsque des abus sont connus. La polémique (On peut dire honteuse) qui a suivi la diffusion de l’affiche n’a fait qu’attiser les haines. Si certains ont usé d’humour, d’autres se sont répandus en insultes et les défenseurs de la police doublés d’anticégétistes primaires n’ont pas été les derniers.

    Gnagnagna pauvres anticégétistes ! Gnagnagna pauvres anti-syndicalistes ! Gnagnagna pauvres réacs !

    L’Etat est responsable de l’institution policière et des agissements de chaque policier. Les violences policières illégitimes peuvent se multiplier si l’Etat ne fait rien pour les empêcher et pire, ainsi les encourage en se servant d’une affiche contre un syndicat et en alimentant une polémique devenue rapidement haineuse à la fois contre les policiers et contre la CGT.

    Fucone

     

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  • Commentaires

    1
    Vendredi 22 Avril 2016 à 09:52

    Ce n'est pas un journal "gauchiste" qui en parle et c'est pour cela que nous avons choisi un article du Point pour éviter toute accusation d'ennemi idéologique de la police...
    http://www.lepoint.fr/societe/des-nazis-dans-la-police-28-11-2014-1885212_23.php#xtor=CS2-238

     

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