• Haro sur la SNCM et la CGT...

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    La grève des syndicats de la SNCM a déclenché une campagne de dénigrement ciblant essentiellement la CGT, alors que tous les syndicats, excepté le STC favorable à une compagnie corso-corse, étaient partie prenante. Comme l’a annoncé sur son site le journaliste Alain Verdi, beaucoup de protagonistes du dossier rêvent d’un grand  pandémonium.

    Il ne s’agissait pas d’une grève surprise, puisqu’un préavis avait été déposé depuis un mois pour donner une chance à la négociation. Pendant ces longues semaines, les syndicats se sont heurtés au mépris des actionnaires que sont Transdev et l’Etat. Au lieu de rassurer, ils ont jeté de l’huile sur le feu qui couvait depuis que ces deux actionnaires complices ont renié leur signature d’un plan de relance qui prévoyait 500 suppressions d’emplois acceptées par les syndicats et leurs adhérents.

    La presse libérale en profite pour faire de l’anti-syndicalisme primaire. Le Figaro et autres journaux de droite règlent leurs comptes avec la CGT, sans se soucier de la réalité du dossier SNCM. Peu de journalistes ont suivi la genèse de l’affaire SNCM depuis l’époque de Jacques Chirac et de Dominique de Villepin. Peu de journalistes ont raconté les conditions lamentables dans lesquelles la compagnie maritime a été mise sur la voie de la privatisation, après avoir rapporté des dividendes à un fonds de placement Butler dont le dirigeant est un proche ami du Premier ministre de Chirac. Peu de journalistes ont relaté les conditions de l’entrée au capital du groupe Veolia, sollicité plutôt qu’intéressé, et les conséquences d’un changement de direction du groupe, qui, depuis lors, a toujours voulu se débarrasser de cette acquisition non désirée.

    Par ailleurs, on nous explique que la filiale Transdev de Veolia est l’associée majoritaire, alors que la Caisse des dépôts et consignations (donc l’Etat), détient 50% du capital de Transdev et donc un pouvoir de décision plus important que celui affiché dan le capital de la SNCM.  Par ailleurs, la SNCM a été financé en partie par des subventions au titre de la délégation de service publique, alors que Transdev refuse de financer un plan de relance pourtant signé par toutes les parties. On peut en déduire que Veolia a peu investi dans la SNCM et n’avait pas l’intention d’investir à long terme.  Par ailleurs, la commission européenne, favorable au low cost et sensible aux lobbies, exige avec insistance, le remboursement de subventions perçues par la SNCM à hauteur de 400 millions d'euros, sans remettre en cause celles allouées à la Corsica Ferries. 

    Au sommet de l’Etat, les premiers ministres successifs de François Hollande et le secrétaire d’Etat aux transports, Frédéric Cuvillier (qui s’est succédé à lui-même pour se dédire) ont  joué un jeu qui ne pouvait déboucher que sur un conflit social. Les responsables politiques ont attendu les échéances électorales et notamment celle  des municipales de Marseille, pour lesquelles la SNCM a été un enjeu local. Passées les élections et les fausses promesses, Cuvillier et Valls sont revenus sur la signature du plan de relance prévoyant l’achat de quatre nouveaux navires. Ils ont laissé débarquer les présidents du directoire et du conseil de surveillance de la SNCM qui avaient participé à l’élaboration et la signature de ce plan. Jouant les traitres et les Ponce pilatte, les représentants de l’Etat ont ainsi donné un blanc-seing à Transdev-Veolia pour annuler le plan de relance et annoncer une mise en procédure collective à la suite d’un dépôt de bilan au greffe du commerce de Marseille. Tout le monde sait que la procédure s’ouvrira sur un redressement judiciaire avec la nomination d’un administrateur avant la liquidation pure et simple qui est restée le seul projet de Veolia et de l’Etat.  

    Le démantèlement de la SNCM est le but poursuivi depuis longtemps qui en arrangerait plus d’un pour des raisons diverses. D’abord, il, y a la compagnie concurrente Corsica Ferries qui a été subventionnée (sans contrôle comptable), ce qui lui a permis de prendre des parts de marché, tout en profitant des conflits sociaux pour proposer des tarifs excessifs lorsqu’elle s’est trouvée en position provisoire de monopole, comme cela était le cas depuis le déclenchement de la dernière grève.  On peut imaginer ce qui va se passer si la SNCM disparaît, laissant la Corsica ferries en position de monopole sur le transport des passagers. Le Jackpot tous les étés pour cette compagnie italo-suisse qui ne pratiquera plus les prix cassés grâce à un management antisocial en dehors des règles fiscales et salariales françaises. Le pire est que la presse libérale montre la Corsica Ferries en exemple contre les lois sociales et fiscales françaises. Les acquis sociaux sont ainsi décriés comme des privilèges chez les salariés français de la SNCM. Cette presse prône, avec cynisme, la régression sociale et le low-cost. Et d’aucuns d’applaudir sans réaliser que c’est aussi leur intérêts que les syndicats défendent !

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    Aujourd’hui, nous avons l’impression d’assister à la curée sur la SNCM avec, pour manœuvre, de rendre les syndicats, et en premier lieu la CGT, responsables de tous les maux de cette compagnie. D’ailleurs, la presse site abondamment la CGT en oubliant que c’est une intersyndicale qui a décidé de la grève et que d’autres syndicats s’y montrent combattifs.

    Où sont les vraies responsabilités ? Il suffit d’aller sur le site d’Alain Verdi et de bien vouloir écouter ce que les syndicats de la SNCM (excepté le STC) répètent depuis des lustres.

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    Le dicton « Qui veut tuer son chien, l'accuse d’avoir la rage » illustre ce que vivent les salariés de la SNCM trahis par le gouvernement Valls face à un véritable complot aux motivations financières et politiques. Toutefois, dans le conflit qui vient de prendre fin grâce à une trêve sociale, la rage était à Porto-Vecchio et au siège bastiais de la SNCM. Nous ne pouvons croire que ce sont des socioprofessionnels qui ont attaqué le bateau Jean Nicoli et saccagé le siège de la SNCM. On peut imaginer qui est derrière l’opération «  SNCM fora ! », même si l’inquiétude des entrepreneurs et commerçants reste compréhensible. On se demande quel motivation animait ceux qui, à Porto Vecchio, ont mis le feu aux amarres du Jean Nicoliet l’individu masqué qui s’acharne sur une maquette de bateau lors du saccage du siège de la SNCM ? Une violence qui contraste avec l’attitude responsable des grévistes qui ont obtenu un moratoire et, malgré le couperet mis au dessus de leur tête, ont repris le travail.

    En Corse, entre le Préfet qui assurait que toutes les dispositions avaient été prises pour assurer la continuité territoriale et les manifestants socioprofessionnels clamant le contraire, qui croire ? Des hôteliers se sont plaints d’une avalanche d’annulations faites par les touristes ayant renoncé à un séjour en Corse. Sont-ils les seuls à regretter l’absence d’afflux touristique parmi les adversaires de la SNCM ? Le fait est que le premier ministre a été plus prompt à répondre aux demandes des entrepreneurs corses qu’à celle des salariés de la SNCM.

    Va-t-on connaître le scénario sarde ? Selon Joseph Martinetti : « Sous la pression des résidents sardes, des professionnels du tourisme, mais aussi de ses alliés politiques sardistes, il fut décidé de créer une compagnie régionale la flotta sarda. Filiale de la compagnie régionale SAREMAR, elle devient locataire de deux navires qu’elle affrète sur les lignes entre la Sardaigne et le continent italien (Golfo-Aranci-Civitavecchia). L’exécutif sarde envisage à court terme une privatisation de la compagnie régionale SAREMAR et en conséquence celle de la flotta sarda Spa. L’avenir dira si cette régionalisation privatisée de la desserte maritime peut constituer une alternative à la privatisation de l’ancienne compagnie nationale! Comme le suggère au cours d’un reportage documenté le journaliste Alain Verdi de FR3 Corse, la Corse peut-elle connaître la même évolution? La régionalisation de la SNCM a déjà été évoquée en Corse au cours des années 2000 par une fraction minoritaire du mouvement nationaliste, au sein du Syndicat des Travailleurs Corses (STC). Le syndicaliste Alain Mosconi en fait aujourd’hui encore un thème central de son engagement militant. Ce nationaliste connu pour être à l’origine de la spectaculaire mutinerie du navire Pascal Paoli de la SNCM en 2005 et pour avoir figuré sur les listes européennes du trotskyste Olivier Besancenot en 2008, peine à convaincre des milieux nationalistes très majoritairement acquis à la Corsica Ferries » (extrait article Joseph Martinetti « Transports maritimes et insularité en Europe: le cas de la Corse » sur le site Espace politique).

    Si la SNCM disparaît, bon nombre de ceux qui se sont laissés entraîner dans une campagne de dénigrement injuste vont déchanter. La compagnie corse qu’on leur promet  ne verra pas le jour. Les bateaux de la SNCM seront vendus et iront vers d’autres horizons marins. Le tout est de savoir pendant combien de temps la Méridionale tiendra contre le lobbying et la concurrence agressive de la Corsica Ferries ? Le scénario voulu devrait déboucher sur un monopole de fait après l’élimination de toute concurrence. Ce sera une compagnie étrangère privée qui obtiendra les subventions et fera ses tarifs pour distribuer des dividendes à ses actionnaires italo-suisses.

    Rappelons que la SNCM a employé jusqu’à 2400 salariés dont 800 résidents en Corse. Aucun recensement des salariés d’origine corse n’a été effectué mais des employés corses résident sur le continent. A ces 2400 salariés, s’ajoutent tous les emplois induits chez les sous-traitants. La disparition de la SNCM ferait perdre au total plus de 4.000 emplois. La réalité sociale est là, face à la compagnie Corsica ferries qui emploie sur ses navires des Italiens, des Roumains et autres nationaux acceptant les conditions de travail et de salaires que la compagnie italo-suisse leur impose. Par ailleurs, la politique tarifaire va forcément changer car, ne l’oublions pas, la finalité du capitalisme est de faire de gros profits et non pas d’assurer la continuité territoriale comme un service public.

    Ne nous laissons pas manipuler !

    Matelone

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  • Commentaires

    1
    Compléments d'inform
    Vendredi 11 Juillet 2014 à 16:29
    Le rôle de la CTC ne doit pas être oublié: elle a donné 160 millions d'euros depuis 2002 à fin 2013 à la Corsica Ferries. La Corsica Ferries est une société privée et on ne sait pas quels intérêts se trouvent derrière cette société. Le but de la CTC est de mettre la main sur le marché et sur l'argent de la continuité territoriale. Ce serait pour faire une société d'économie mixte avec la compagnie méridionale et la corsica ferries auxquelles elle louerait les navires de l'ex SNCM. (les pertes d'emplois en Corse seraient très élevées). Là encore il est difficile de savoir quels intérêts sont derrière pour reprendre ces montagnes d'argent, mais certains professionnels de l'hotellerie rêvent aussi de récupérer une partie de cette manne depuis longtemps. Cela nous ramène aux socioprofessionnels: les natios les ont soutenus sans réserves car ce sont des revendications corporatistes et poujadistes pour la plupart (tous les socioprofessionnels ne sont pas à mettre dans le même sac). Il y a eu un affrontement classe-contre-classe et certains socioprofessionnels corporatistes et les "natios" se sont naturellement rejoints sur une ligne anti-syndicale d'extrême droite. Pour les socioprofessionnels les plus impliqués dans cette voie, des consugnes de boycott de leurs commerces et de leurs entreprises devraient être lancées. Il est à noter que les manifs de socioprofessionnels ont été très peu soutenus par la population: la population sait que si elle a un pouvoir d'achat aussi bas elle le doit aux prix très élevés pratiqués par ces socioprofessionnels. Enfin, la direction du STC marins (il faut parler de la direction car de nombreux syndiqués STC-ce qu'il en reste à la SNCM, assez peu- ont fait grève car ils ont très bien compris la manoeuvre) a été un syndicat "jaune" car elle a des intérêts dans la manoeuvre de la CTC. Il faut souhaiter que les procédures judiciaires engagées par la CGT et la SNCM contre la CTC, la Corsica Ferries et les opérateurs aboutiront favorablement car elles sont les seules capables de faire échouer ce jackpot (qui serait un désastre pour la Corse).
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