• Le triomphe de Matteo Renzi

    Ou pour qui sonne le glas de la gauche italienne

    Matteo Renzi, jeune maire de Florence, vient d’écraser ses concurrents lors des primaires pour l’élection du secrétaire du Parti démocrate, avec un score de 68%. Près de trois millions de personnes ont fait le déplacement, ce dimanche 8 décembre 2013.

    Le champion de la « rottamazione », c’est-à-dire l’élimination des vieux dirigeants du parti – enlève-toi de là que je m’y mette - l’a donc emporté largement. De nombreuses personnalités ont salué sa victoire, en particulier et parmi les tout premiers, un certain Silvio Berlusconi, rendu célèbre par ses frasques, ses soirées agitées, les fameuses bunga-bunga et surtout par plus de vingt ans de pouvoir au résultat particulièrement éloquent : un pays secoué par une crise sans précédent, des millions de chômeurs, une désespérance galopante, des magouilles en tout genre.

    Que penser de Matteo Renzi ? Il est jeune, dynamique, empathique, populaire. C’est un peu notre François Bayrou, en plus fougueux. Il a un goût prononcé pour le show. Il a bénéficié – il faut le souligner – d’un appui exceptionnel de la quasi-totalité des media de la péninsule et de la bienveillance de secteurs entiers de la droite. Il est d’extraction démocrate-chrétienne, comme par mal de dirigeants du Parti démocrate, comme par exemple l’actuel président du conseil, Enrico Letta. Dans son adolescence, il a été boy scout. Il a frayé un moment avec le Parti populaire, émanation de la Démocratie-chrétienne. Ses modèles : Barack Obama et Tony Blair ! Quand on s’aventure à éplucher son programme, on s’aperçoit bien vite que c’est une coquille vide. Celui de François Hollande, en comparaison, pourrait être qualifié d’ultra gauchiste. Matteo Renzi est connu pour ses positions anti syndicales. « Il faut qu’ils maigrissent », s’est-il une fois écrié. Ca nous rappelle quelqu’un en France. Il préfère le doux confort des bureaux feutrés de dirigeants d’entreprises aux  contacts avec les ouvriers ou encore il voue son admiration pour un certain Macchionne, délégué général et fossoyeur de la Fiat en Italie. Rappelons enfin son célèbre repas à Arcore avec Silvio Berlusconi. D’ailleurs, jamais dans ses discours, il ne parle pas de ceux qui souffrent, des ouvriers, des chômeurs, des jeunes, de la santé, de l’état de l’éducation nationale, de la crise, de ses causes, etc.  Il se contente de chiachierare, de bavarder. C’est un bateleur. Il va parachever l’œuvre commencée à la Bolognina en 1990 par Achille Occhetto et Giorgio Napolitano, actuel président de la république, c’est-à-dire la liquidation définitive de ce qui restait du grand Parti communiste italien. Gramsci, Togliatti et Berlinguer doivent se retourner dans leur tombe. Etrange coïncidence, à un jour près, à Kiev des militants d’un parti ultra nationaliste abattaient et décapitaient la statue de Lénine, l’homme qui avait contribué en 1917 à ébranler le monde et à effrayer tous les réactionnaires de la planète.

    L’Italie est orpheline de sa gauche. Et ce n’est pas avec le « nouveau Parti démocrate » qu’elle pourra retrouver la voie de l’espérance et du progrès.

    Reste à souhaiter que la vraie gauche puisse un jour se réunir, relever la tête et retrouver la force et la puissance qu’elle a connues dans le passé. Et proposer autre chose que des paroles. En un mot, proposer une authentique alternative de gauche à la crise.

    Jean-Pierre Orsi

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