• Michel Zevaco et le roman populaire

    zevacoAu 20èmesiècle, un nouveau genre est apparu en France, le roman noir populaire et social. On le case, par filiation, dans le rayon « polars » aux côtés du roman policier, du roman à énigme, du thriller…

    On oublie que, au 19èmesiècle, un auteur avait déjà transformé le roman de cap et d’épée en roman populaire, républicain et social, revisitant l’histoire de France, avant la révolution de 1789.

    Après Zévaco, le roman populaire connaît d’autres bonheurs dans des genres dérivés comme le policier ou la science-fiction. Mais, dans la veine du roman feuilleton historique et de cape et d’épée, bien tristes sont ses successeurs, sauf peut-être,  aujourd’hui, Valerio Evangelisti  et quelques autres.

    Michel Zevaco est d’origine corse.Bien qu’un village insulaire porte son nom,  Il est né à Ajaccio en 1860.  Les premiers noms de famille "Zevaco" auraient été attribués au XVè siècle, à des habitants des faubourgs d'Ajaccio, originaires de ce  village. Ce nom ne figure toutefois sur aucun texte relatif à l'histoire du village depuis le 18ème siècle. On connaît Laurent Zevaco, maire d'Ajaccio en 1848. Plus récemment, Monseigneur Zevaco, né en 1925 à Vico, fut nommé évêque de Madagascar en 1968 par le pape Paul VI. Michel Zevaco  est mort à Eaubonne (Val d'Oise) en 1918.Cet écrivain est connu pour ses deux séries " Le Capitan " et " Le Chevalier de Pardaillan ".

    Jean-Paul Sartre a parlé de Michel Zévaco  dans « Les mots » : " Surtout, je lisais tous les jours dans Le Matin, le feuilleton de Michel Zévaco : cet auteur de génie, sous linfluence de Hugo, avait inventé le roman de cape et dépée républicain. Ses héros représentaient le peuple ; ils faisaient et défaisaient les empires, prédisaient dès le XIVème siècle la Révolution française, protégeaient par bonté d’âme des rois enfants ou des rois fous contre leurs ministres, souffletaient les rois méchants. Le plus grand de tous, Pardaillan, cétaitmon maître : cent fois, pour l’imiter, superbementcampé sur mes jambes de coq, j’ai giflé Henri III et Louis XIII."

    Jacques Siclier(critique et historien du cinéma) a dità propos du Chevalier de Pardaillan : " Pardaillan peut être considéré comme un héros caractéristique de la France républicaine des années 1900. Il représente un symbole de liberté et d'héroïsme national, contemporain, ne l'oublions pas, du Cyrano de Bergerac réinventé par Rostand. On le voit, en 1572 (il a vingt ans) sortir, grâce à son astuce, de la Bastille où on l'avait arbitrairement enfermé. On le voit, seize ans plus tard, de nouveau captif, prendre la Bastille à lui tout seul. Ce n'est pas tout. Pardaillan ne croit ni à Dieu ni à diable. Il se range aux côtés des huguenots parce que les huguenots sont les victimes, mais la religion lui importe peu. Zévaco, qui reste discret quant à l'Église réformée, peint les représentants de l'Église catholique sous le jour le plus noir, du haut en bas de la hiérarchie. Son anticléricalisme foncier – autre marque politique, de la Belle Époque – fait de Pardaillan un homme complètement détaché de la religion et de la foi, uniquement soucieux de valeurs humaines. Et Pardaillan ne consent jamais à servir un maître. C'est un homme libre. Ni Dieu ni maître."

    Les récits de Michel Zévaco lui ont survécu parce qu’il a su mêler le roman de cape et d'épée à des préoccupations politiques qui percent à travers la légèreté du récit. Il s'est engagé toute sa vie sur le terrain politique.Professeur de Lettres à Vienne (Isère), il quitte son poste en 1881 pour s’engager dans les Dragons en 1882. Cette période militaire lui inspire l’ouvrage Boute-Charge (1888)sur le panache militaire que l’on trouve ensuite dans ses récits de cape et d'épée. Ayant déjà des idées anarchistes malgré sa période militaire, à partir de 1888, installé à Paris, il se rapproche du socialisme et de l'anarchisme français.

    En 1889, il entre à  Egalité, journal anarchisant dans lequel il publiera son premier feuilleton, Roublard et Cie (1889), où le discours politique tient une grande place. Zévaco se présente aux élections législatives de 1889, fonde des syndicats, et écrit pour faire passer ses idées (un article écrit contre le Ministre de l’Intérieur lui valut quatre mois de prison, séjour qui sera suivi d’un autre, pour raisons politiques également, quelques années plus tard). Il est condamné le 6 octobre 1892 par la cour d'assise de la Seine pour avoir déclaré dansune réunion publique à Paris :" Les bourgeois nous tuent par la faim ; volons, tuons, dynamitons, tous les moyens sont bons pour nous débarrasser de cette pourriture. "

    Il participera à plusieurs journaux et revues, parmi lesquels L’en-dehors, Le Gueuxou Le Courrier Français. Avec le roman feuilleton Borgia, paru en 1900 dans La Petite République Socialiste (journal dirigé par Jaurès), sa carrière de romancier débute réellement. Après le succès énorme de ce récit, il réduit ses activités journalistiques et se tourne vers la fiction avec Triboullet(1900-1901), Le Pont des soupirs (1901), et surtout, en 1902, le premier Pardaillan, début d’une longue série.

    Il  a écrit plus de 1 400 feuilletons (dont, à partir de 1903, les 262 de La Fausta, qui met en scène le chevalier de Pardaillan) pour le journal de Jaurès, jusqu'à décembre 1905, époque à laquelle il passe au Matin,

    Parallèlement à ce cycle romanesque, d’autres œuvres dont Fleurs de Paris(1904) et Les Mystères de la tour de Nesle(1905, publié fréquemment sous le titre de La Tour de Nesle).

    Au journal " Le Matin ", à partir de 1906, il devient le feuilletoniste en vogue aux côtés de Gaston Leroux, avec plusieurs titres : Le Capitan, Nostradamus(1906), (1907), LHéroïne(1908), ou encore LHôtel Saint-Pol (1909). Il sera un auteur à succès jusqu’’à sa mort en 1918. Entre 1906 et 1918, Le Matin publie en feuilletons neuf romans de Zévaco. Son dernier roman, posthume, est Le Pré aux Clercs. Les autres œuvres publiées à titre posthume sont :

    La Reine d'Argot — Tome I et Primerose — Tome II (1922 — Tallandier, Le Livre national, 325 et 326)

    La Grande Aventure — Tome I et La Dame en blanc, La Dame en noir — Tome II (1926 — Tallandier, Le Livre national, 349 et 350)

    Fleurs de Paris(1921 — Tallandier, Librairie Populaire et moderne, Roman d’amour et de passion inédit — 30 fascicules)

    Déchéance(1935 — Tallandier, Le Livre national, 972)

    Plusieurs de ses romans ont fait l'objet d'adaptation au cinéma et à la télévision, notamment :
    1960 ; le film "
    Le Capitan" d'André HUNEBELLE (1960) avec Jean Marais et Bourvil,

    1988, une série télévisée de 15 épisodes, avec patrick Bouchitey(Pardaillan) et Philippe Clay.

    1997: Pardaillan, téléfilm d'E. Niermas, avec Jean-Luc Bideau (Pardaillan père), Guillaume Canet (Pardaillan fils) et Garance Clavel (France).

    Signé: Pidone

    Google Bookmarks

    Tags Tags : , , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :