• On ne redeviendra pas des pauvres cons...

    flammerose

    On nous annonce une progression de l’électorat FN et que les abstentionnistes ne craignent plus de le laisser passer. La presse veut ainsi responsabiliser et culpabiliser les gens à chaque sondage. L’élection partielle de Brignoles vient illustrer ce qui peut apparaître comme une fascisation des esprits si l’on ne tenait pas compte des abstentions (66,66% au premier tour). A qui la faute ?

    L’Europe est majoritairement à droite et les partis dits « socialistes » y font la politique du capital avec une obstination qui démoralise les électeurs de gauche. La plupart des déçus grossissent les rangs des abstentionnistes  avec le sentiment que le vote utile ou républicain est une manœuvre politicienne à l’issue de laquelle ils seront toujours trahis. Les élections perdent de leur importance et la chanson  soixante-huitarde « Magouille blues » de François Béranger illustre l’état d’esprit des abstentionnistes de gauche  et notamment le passage qui suit :

    Ils n'ont jamais autant de cœur
    Que quand il leur faut beaucoup d'électeurs
    Quand le jour J sera passé
    Finis les serments, finis les baisers
    Finies les bonnes résolutions
    On r'deviendra tous des pauv' cons
    En attendant, ils veulent nous faire croire à
    Des arguments de bazar
    Français, Françaises, soyez réalistes
    Gaffe aux socialo-communistes
    C'est là qu'est le plus grand danger
    Pour notre vieux pays traumatisé

    Le projet de moralisation des mœurs politiques a accouché d’une souris et alimente le « tous pourris » en donnant un poids moral au ressentiment populaire envers un parti socialiste omnipotent qui ne change rien malgré les promesses électorales de son Président. Le Parti socialiste évolue vers un parti démocrate à l’Américaine avec ses primaires et le « tactical voting », le vote utile  qui, en français, ne veut pas dire son nom « vote tactique ». Dans la stratégie politique, on trouve aussi le jeu des alliances. La prochaine échéance électorale est celle des élections municipales. Dans plusieurs villes et en premier lieu à Paris, le PCF ira avec le PS aux urnes. C’est le choix de la préservation des acquis électoraux qui a été alors fait pour sauver des sièges dans une déroute électorale du PS annoncée. Jean-Marc Ayrault a dit que Brignoles n’était pas la France. Heureusement Paris non plus ! Qu’il n’en déplaise aux Jacobins ou pas.

    Nous ne reviendrons pas sur le choix désastreux du PCF qui s’allie à un PS dont la nature social-démocrate change après chaque grand rendez-vous électoral. Il suffit de faire l’historique des alliances passées pour constater les désillusions à venir. Le PS a fondé sa politique sur les marges d’adaptation sociale au capitalisme et au développement industriel. Devant les revendications de justice sociale et de démocratie, le capitalisme préfère la spéculation financière, le pillage des richesses des pays et toutes les magouilles politico-financières. Dans un système ultralibéral, les marges sociales se ferment donc. Le PS ne peut qu’évoluer de la social-démocratie vers un Parti démocrate à l’Américaine. A force de prendre les idées de droite au nom de la gauche, François Hollande et son gouvernement déboussolent des électeurs considérés comme des supporters à mobiliser le jour d’une élection.  Comment ces derniers pourraient-ils comprendre une politique antisociale mis en œuvre par un parti se réclamant de la Gauche. Ils finissent par croire que droite, centre et gauche ne sont plus que les emplacements des parlementaires dans les hémicycles. Ils considèrent alors que le capitalisme et ses lobbies les inspirent tous et que l’alternance n’est qu’un jeu politique sans autre alternative qu’une politique ultralibérale et forcément antisociale. C’est triste d’en arriver là avec le droit de vote lorsque l’on revoit la grande histoire de la Gauche et des syndicats. La responsabilité de l’abstentionnisme va au mépris montré par les politiciens envers les mains qui glissent les bulletins de vote dans les urnes.  

    Quant au vote dit de contestation pour le FN et aux abstentions, ils sont le résultat d’une lepénisation du débat public.  Toute autre explication ne sert qu’à dédouaner les forces politiques de toute responsabilité, en culpabilisant les électeurs. Le vote FN sert le vote utile et donc le bipartisme. Comme on le dit dans les romans policiers, il faut toujours chercher à qui profite le crime. C’est ce que pense la majorité actuelle des électeurs abstentionnistes dont le nombre croissant pose la question de la légitimité des élus dans des élections où les suffrages exprimés deviennent minoritaires dans l’ensemble du corps électoral. Cette situation met la démocratie en danger. Nous l’avons vue à Brignoles avec plus de 60% d’abstentions.  Brignoles, c’est la France et le résultat de son élection partielle, remportée par le FN,  préfigure d’autres élections dans lesquelles le bipartisme domine le débat public en le lepénisant.

    Il nous vient à l’esprit le théâtre de Brecht qui a vécu la montée du nazisme en Allemagne mais aussi son poème, La Solution, qui disait : « J'apprends que le gouvernement estime que le peuple a « trahi la confiance du régime » et « devra travailler dur pour regagner la confiance des autorités ». Dans ce cas, ne serait-il pas plus simple pour le gouvernement de dissoudre le peuple et d'en élire un autre ? » Cette boutade illustre bien la politique actuelle de François Hollande qui voudrait changer le peuple de gauche mais c’est lui qui devra être réélu et c’est l’assemblée nationale qui sera dissoute. Pour faire patienter, le Chef de l’Etat parle d’un « quinquennat inversé ». Il fait d’abord avaler les couleuvres. Il distribuera ensuite quelques douceurs et de nouvelles promesses électorales. Le peuple de gauche n’aura pas changé et  sera toujours là pour dire qui a trahi la confiance de l’autre. On dit aux enfants qu’il ne faut pas jouer avec le feu au risque de se brûler les doigts et de créer un incendie. C’est valable pour les adultes des média et des partis politiques lorsqu’il s’agit de la flamme du Front national. Le peuple ne se laissera pas amener dans un monde ubuesque mais on ne redeviendra pas tous des pauvres cons après les élections.

    Fucone

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