• Dany le marron

    Daniel Cohn-Bendit s’est bâti une carrière sur les souvenirs soixante-huitards. Dany le rouge est devenu Cohn-Bendit le vert. Il faut dire que la couleur rouge ne faisait référence qu’à la rousseur de ses cheveux qui ont blanchi au parlement européen de Strasbourg.  L’eurodéputé (ou heureux député si l’on veut) ne se plaît pas à Strasbourg et voudrait que le Parlement européen soit installé à Bruxelles et, en compensation installer dans les locaux une grande université européenne.

     «La majorité des députés européens plébiscite un siège unique du Parlement à Bruxelles», avait-il fait valoir, en jugeant «complètement anachronique» le maintien à Strasbourg du Parlement européen. Selon lui, ce  serait «tout bénef, même pour les hôtels strasbourgeois». Sans doute se voit-il chargé de cours dans cette grande université après son intrusion dans l’université Paris X en avril 2012.  Sur Europe 1, l’eurodéputé est revenu sur ce projet qu’il défend depuis plusieurs années: recentrer  le Parlement européen à Bruxelles et créer à Strasbourg un pôle universitaire.

    Il faut dire que la radio Europe N°1 lui a ouvert une tribune « L’humeur de Daniel Cohn-Bendit » dans laquelle il peut s’en donner à cœur-joie. Après Canteloup, voici Cohn-Bendit en moins marrant ! Aujourd’hui il a dénoncé le gouvernement vénézuélien et apporter son soutien aux manifestants. Il a désigné les gentils et les méchants. Il en a profité pour donner  sa vision négative de la gouvernance cubaine de feu Chavez et son successeur Madero. Il dénonce l’anticapitalisme et l’antiaméricanisme bête et méchant. Tout cela pour finalement étriller Jean-Luc Mélenchon comme étant le Chavez français qui rêvent de faire d’interminables discours à la radio et à la télévision publique comme Castro, Chavez et Maduro. Cohn-Bendit joue au billard à trois bandes pour atteindre sa cible : la gauche anticapitaliste et le Front de gauche. Il en arrive même à critiquer le point de vue de son journal libertaire préféré, Libération.

    Dernière intervention de Dany Cohn Bendit sur Europe 1 : À l'ombre de l'Ukraine, le Venezuela (Cliquer)

    Mai 68 est bien loin de ce personnage qui butine entre la France et l’Allemagne sur des fleurs écologiques. Daniel Cohn-Bendit dit aujourd'hui être favorable au capitalisme, à « une écologie qui prenne acte de l'économie de marché pour mieux la réguler ». Membre des Verts Allemands depuis 1984, il a déclaré dans L'Humanité à l'occasion de la campagne pour les élections européennes de 1999 qu’il prône un « réformisme écologico-social liée à une tradition libertaire qui est effectivement non étatique ». C’est sa façon de se dire libéral. Il a ensuite revendiqué à cette même occasion l'étiquette de « libéral-libertaire ». Lorsqu’il utilise aujourd’hui le mot libertaire, il faut traduire « libertin » si on en croit certains de ses écrits sur la sexualité des enfants. L’association « libéral » et « libertaire » est un oxymore qui joue sur le mot liberté. Le libertaire est un anarchiste.  

    L'anarchie n'est pas le désordre social mais au contraire l'ordre social absolu grâce notamment au collectivisme anticapitaliste qui contrairement à l'idée de possessions privées capitalisées, suggère l'idée de possessions individuelles ne garantissant quant à elles aucun droit de propriété concernant l'accumulation de biens non utilisés. Le projet libertaire n’a rien à voir avec une politique libérale qui organise le désordre social par la dérèglementation du travail et le libre-échange des produits et des hommes. Le capitalisme permet l’accumulation de bien non utilisés et la spéculation. Les libertaires ne reconnaissent certainement pas Cohn-Bendit comme un des leurs et il ne cesse de les ostraciser pour leur anticapitalisme. Il a du reste été élu sous la couleur verte et non pas la noire de l’anarchie.

    Daniel Cohn Bendit est un écologiste allemand de droite qui vient s’amuser de la politique en France où il est entré dans le jeu des socio-libéraux et de la Droite. Il s’est fait élire alternativement sur les listes des Verts des deux côtés du Rhin. Il a pu ainsi garder un siège de député européen depuis 1994. En se posant en défenseur de la liberté, il fait de la propagande libérale.

    Bien qu'ayant jadis dénoncé les « élections bourgeoises», il a donc entamé une carrière politique en Allemagne. En juin 2009, il s’est présenté aux élections européennes en France, au sein de la liste Europe Écologie, qui rassemblait les Verts et des personnalités proches des idées écologistes, notamment Eva Joly, Cécile Duflot, et José Bové. Il était en tête de la liste Europe Écologie pour la circonscription Île-de-France, l'ancienne magistrate Eva Joly y figurant en deuxième position. Le 2 avril 2012, il est nommé au conseil d'administration de l'université Paris-X en tant que personnalité extérieure. « Personnalité extérieure » ? Cela lui va bien et s’accorde avec le mot « entrisme » qui résume sa carrière politique chez les Verts.

    Le 23 septembre 2012, il déclare après le «non» d’EELV au traité européen qu'il « suspend son adhésion » au parti écologiste. Le 27 septembre 2012, il lance le groupe de réflexion « Europe et Écologie » pour promouvoir une « approche pragmatique mais ambitieuse » de l'Europe… « Pragmatisme » et « ambition » les mots trompeurs pour se servir du fond de commerce écologique. Ce sont ceux de la Droite libérale et de la social-démocratie des deux côtés du Rhin. Le 7 décembre  2012, il annonce officiellement avoir quitté EELV et déclare se consacrer maintenant uniquement à son groupe de réflexion. Il ne sera pas candidat aux prochaines élections européennes. A se demander si la vraie raison est que les écologistes allemands et français ne veulent plus de lui.

    En 1989, il a été nommé adjoint au maire SPD de Francfort-sur-le-Main, chargé des affaires multiculturelles. Il avait donc évolué officiellement vers la social-démocratie dans l’espoir sans doute d’obtenir un poste de ministre si le parti social-démocrate allemand remportait des élections nationales. Il est sans aucun doute avec Cécile Duflot l’un des artisans du rapprochement EELV et PS pour les élections présidentielles en France et l’entrée de ministres verts au gouvernement Ayrault.

    A 68 ans, Daniel Cohn-Bendit a donc entamé une carrière de responsable de Think tank, club de réflexion à la solde de lobbies. Du parlement européen, il passe au lobbying direct mais finalement n’est-ce pas sa véritable activité depuis longtemps ? Nul n’ignore l’influence des lobbies dans l’Union européenne. Pour qui roule-t-il ? Bien sûr pour lui-même en premier lieu. Il ne faut toutefois pas perdre de vue qu’il a choisi le camp des pro-capitalistes favorables au traité européen et, sans doute, au grand marché transatlantique « pragmatique et ambitieux ». Après le sommet de Lisbonne en novembre 2010, le Parlement européen, représentant un peuple européen qui n’existe pas, avait renouvelé à l’approche de ce sommet « son soutien à la création d'un marché transatlantique sans entraves d'ici à 2015 ». Le 11 novembre 2010, il a adopté un texte dans la continuité par exemple de la résolution du 26 mars 2009. Rappelons que le groupe Verts/ALE de José Bové, Eva Joly et Daniel Cohn-Bendit, avait déposé une proposition de résolution le 3 novembre 2010 dans laquelle on peut lire, par exemple, qu’il « souligne qu'un partenariat transatlantique plus étroit, pour améliorer le fonctionnement du marché transatlantique sur la base du principe d'une économie sociale de marché, est un instrument important pour canaliser la mondialisation et s'attaquer aux crises économiques et sociales d'envergure planétaire », rejoignant à quelques détails près le point 33 de la proposition de résolution du groupe S&D de Vincent Peillon datée du 29/10/10. Daniel Cohn-Bendit prône pour un atlantisme écologique. Une économie sociale de marché ? Tout un programme ! L’art de l’antinomie au service de l’hypocrisie. Comme si la loi du marché donnait des droits sociaux. A l’époque, peu de temps avant le sommet de Lisbonne, Daniel Cohn-Bendit avait commencé à injurier Jean-Marc Mélenchon qui avait répondu aux attaques outrancières sur son blog (cliquer ICI)

    Daniel Cohn-Bendit imagine un capitalisme maîtrisé et écolo pour faire la propagande du capitalisme et faire croire que la mondialisation peut être canalisée. Il veut faire d’un mal ancien la seule perspective d’avenir. Pour cela il a ces cibles privilégiées : Jean-Luc Mélenchon, le Front de gauche et tous les anticapitalistes. Il a émergé sous la bannière rouge et noir mais aujourd’hui ce mélange a donné du marron. Dany le rouge est devenu Dany le marron. Il a trouvé une formule ambigüe: « L’ennemi de mon ennemi est mon ami »  pour définir le soutien de Jean-Luc Mélenchon à Chavez contre les Etats-Unis. Le problème avec Cohn-Bendit est qu’il est l’ami de l’ennemi de la gauche et l’ennemi de l’ami de la gauche. Cet ennemi sans non que dénonçait Hollande pour se faire élire. Alors c’est sûr l’ami de l’ennemi est un ennemi et l’ennemi de l’ami est un ennemi aussi. Quoi d’extraordinaire ? Pourquoi pactiser avec l’ennemi comme le fait ce bobo voyageur? C’était le sens du combat des résistants pendant l’occupation allemande mais Daniel Cohn-Bendit est né après la guerre. Il s’est fait remarquer en mai 68 et vit sur l’image du Juif allemand interdit de séjour en France par de Gaulle.  A 19 ans, il avait choisi la nationalité allemande et n’a toujours pas voulu bénéficier de la double nationalité. A croire qu’il a un problème avec la France qui n’est pour lui qu’un terrain électoral et une source de revenus.

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    Que faire ? C’est le titre de son petit traité d'imagination politique à l'usage des Européens.  Il a choisi la bonne solution finale pour lui : ne plus se représenter aux élections européennes. Cette perspective est de bon augure pour le mouvement écologiste européen. Ce sera un défenseur du grand marché transatlantique en moins. Nous arroserons son départ entre amis devant un canon de rouge. En attendons, nous éviterons les Matinales d’Europe 1 et les diatribes d’un amuseur de plus au service de l’audimat. Il y a bien d’autres radios plus intéressantes et pour commencer celles des ondes corses.

    Battone

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