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     Deux livres à lire

     

     

     

     

    Deux livres écrits par Shlomo Sand, professeur émérite à l'Université de Tel Aviv.

    Ces deux livres remettent en cause tout le récit traditionnel sur l'origine du "peuplé juif", de son homogénéité et sur le mythe de la "terre promise".

    Ils posent la question de l'authenticité et l'ampleur de la diaspora juive. Ils montrent que le judaïsme a connu une expansion importante de prosélytisme - au cours des premiers siècles de notre ère - qui lui a permis de s'étendre bien au-delà de la Méditerranée, avec par exemple sa diffusion dans l'empire Khazar.

    Ils remettent en question également l'ethnocentrisme développé à la fin du XIXe siècle par le courant sioniste. Pour Shlomo Sand il n' y a pas de "peuple juif" et que le retour à "la terre promise" - sur lequel "le peuple élu" aurait un droit de propriété inaliénable - ne procède que du mythe.

    Les deux livres, parus il y a une quinzaine d'années, avaient suscité beaucoup de controverses, de débats houleux et passionnés. Et des menaces de mort à l'endroit de leur auteur.

    Ils sont aujourd'hui plus que jamais d'actualité, en raison de la guerre israélo-palestinienne. Ils devraient nous permettre d'en saisir les véritables causes.

    A lire ou à relire.

     

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  • Les loups sont entrés

    dans Gaza

     

    On s’y attendait après l’horrible carnage perpétré le 7 octobre par le Hamas sur le territoire israélien. La riposte ne s’est pas fait attendre. Comme disait Netanyahou « il faut éradiquer le Hamas, tuer ses éléments jusqu’au dernier ». Au nom du droit d’Israël de défendre le pays. Et le rouleau compresseur de Tsahal s’est mise en route sur tout le territoire de Gaza. Première phase. Bombardements massifs, intenses, terriblement meurtriers. Blocus total de l’enclave. De prison à ciel ouvert, Gaza va devenir un gigantesque cimetière où sont entassés plus de deux millions de personnes vivant déjà dans des conditions plus que précaires. Tout cela sous le regard bienveillant, voire même, complice de la plupart des pays occidentaux, en particulier des Usa. Agrémenté, il faut le souligner par des commentaires sur toutes les chaines de télévision et la presse écrite de nos pays quasiment en faveur – et sans retenue – de l’Etat d’Israël. Il est vrai qu’une vie palestinienne ne vaut pas grand-chose.

    Les loups sont entrés dans Gaza. Deuxième phase. L’intervention sur le sol gazaoui. Nouveaux carnages et amplification du siège du territoire avec coupures d’eau, d’électricité. Démolition systématique des immeubles et autres habitations. Un des objectifs étant d’amener la population à quitter Gaza. Pour aller où ? La fameuse formule "la valise ou le cercueil". Cela ressemble fort à de l’épuration ethnique. Les morts et les blessés se comptent par dizaines de milliers. Sans oublier le préjudice moral des populations face à l’enfer imposé par Netanyahou. Que restera-t-il à l’avenir dans la tête de ceux qui vivent cette tragédie ? Sinon de la haine et un désir de vengeance. La tragédie n’est pas finie.

    Au même moment, une répression sanglante se poursuit dans les territoires occupés. On tue allègrement des Palestiniens. On les chasse de leur terre, on détruit leurs maisons. Les colons armés jouent le rôle de supplétifs. Ils tuent aussi. Ils crient : « mort aux arabes ». Même objectif. Opérer de l’épuration ethnique. La boucle est bouclée. Tout cela au nom de valeurs mythiques, pour le moins douteuses, basées sur le retour à la terre promise par Dieu ! Que ne ferait-on pas pour justifier l’injustifiable ?

    A force de jouer au suprémacisme, à l’ethnocentrisme et de mener une politique coloniale et d’apartheid les dirigeants israéliens contribuent à la mise en péril l’existence même de l’Etat d’Israël.

    Maria Maddalena Lanteri

     

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  • Pour une paix juste et durable

    Ajaccio, jeudi 25 octobre 2023. 18 heures.

     

    Plus d’une centaine de personnes se sont réunies devant la Préfecture de région, à l’appel de plusieurs associations, syndicats et partis politiques de gauche dont Inseme a manca/Ensemble. Elles étaient là pour exiger une paix juste et durable entre Israël et la Palestine où la situation est dramatique et risque de déboucher sur un effroyable désastre humanitaire.

    Les manifestants ont condamné avec la plus grande fermeté le massacre de 1400 civils israéliens perpétrés par le Hamas. Aucun résistant digne de ce nom ne saurait s’en prendre à des femmes, à des enfants, à des civils. Dans le même temps, pour ces manifestants il n’était pas question non plus de cautionner la brutale et inadmissible réponse de l’Etat d’Israël, en bombardant aveuglément la bande de Gaza, occasionnant de véritables tueries de masse, avec plus de 5000 morts, des milliers de blessés et d’immenses dégâts matériels. Au motif du « droit de se défendre » du peuple israélien !

    Plusieurs intervenants ont rappelé que la solution au problème ne pouvait être que politique. Et que ce problème a des causes profondes qui remontent à plusieurs décennies. Entre autres causes, la politique d’occupation de territoires en Cisjordanie, de répressions systématiques contre les Palestiniens, d’apartheid menée par les gouvernements successifs de Tel Aviv. « N’ayons pas la mémoire courte et sélective », disait un manifestant.

    Solution politique donc. Avec la création des deux Etats indépendants sur la base des résolutions de l’Onu de 1967.

    Dans l’immédiat les manifestants ont formulé plusieurs revendications urgentes :

    -       -  Cessez le feu immédiat avec la fin des bombardements et du déplacement forcé de la population gazaouie.

    -                 -     Mise en place d’un corridor humanitaire.

    -                   -    Fin du blocus de la bande gaza.

    C   Comme d’aucuns peuvent le penser et le souhaiter, parfois avec une sordide jubilation – on le voit et on l’entend à longueur d’antennes de télévision tous les jours – croire qu’en éradiquant le Hamas on pourra résoudre le problème de la sécurité d’Israël relève de la myopie et de la surdité absolues. Le problème sera pire et les conséquences tragiques pour les deux peuples.

     

     

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  • Article paru dans le Monde diplomatique d'août 2008. Article plus que jamais d'actualité. Ecrit par Slomo Sand, historien israélien.

     

    Déconstruction d’une histoire mythique

    Comment fut inventé le peuple juif

    Les Juifs forment-ils un peuple ? A cette question ancienne, un historien israélien apporte une réponse nouvelle. Contrairement à l’idée reçue, la diaspora ne naquit pas de l’expulsion des Hébreux de Palestine, mais de conversions successives en Afrique du Nord, en Europe du Sud et au Proche-Orient. Voilà qui ébranle un des fondements de la pensée sioniste, celui qui voudrait que les Juifs soient les descendants du royaume de David et non — à Dieu ne plaise ! — les héritiers de guerriers berbères ou de cavaliers khazars.

    par Shlomo Sand 

     

    Tout Israélien sait, sans l’ombre d’un doute, que le peuple juif existe depuis qu’il a reçu la Torah (1) dans le Sinaï, et qu’il en est le descendant direct et exclusif. Chacun se persuade que ce peuple, sorti d’Egypte, s’est fixé sur la « terre promise », où fut édifié le glorieux royaume de David et de Salomon, partagé ensuite en royaumes de Juda et d’Israël. De même, nul n’ignore qu’il a connu l’exil à deux reprises : après la destruction du premier temple, au VIe siècle avant J.-C., puis à la suite de celle du second temple, en l’an 70 après J.C.

    S’ensuivit pour lui une errance de près de deux mille ans : ses tribulations le menèrent au Yémen, au Maroc, en Espagne, en Allemagne, en Pologne et jusqu’au fin fond de la Russie, mais il parvint toujours à préserver les liens du sang entre ses communautés éloignées. Ainsi, son unicité ne fut pas altérée. A la fin du XIXe siècle, les conditions mûrirent pour son retour dans l’antique patrie. Sans le génocide nazi, des millions de Juifs auraient naturellement repeuplé Eretz Israël (« la terre d’Israël ») puisqu’ils en rêvaient depuis vingt siècles.

    Vierge, la Palestine attendait que son peuple originel vienne la faire refleurir. Car elle lui appartenait, et non à cette minorité arabe, dépourvue d’histoire, arrivée là par hasard. Justes étaient donc les guerres menées par le peuple errant pour reprendre possession de sa terre ; et criminelle l’opposition violente de la population locale.

    D’où vient cette interprétation de l’histoire juive ? Elle est l’œuvre, depuis la seconde moitié du XIXe siècle, de talentueux reconstructeurs du passé, dont l’imagination fertile a inventé, sur la base de morceaux de mémoire religieuse, juive et chrétienne, un enchaînement généalogique continu pour le peuple juif. L’abondante historiographie du judaïsme comporte, certes, une pluralité d’approches. Mais les polémiques en son sein n’ont jamais remis en cause les conceptions essentialistes élaborées principalement à la fin du XIXe siècle et au début du XXe.

    Lorsque apparaissaient des découvertes susceptibles de contredire l’image du passé linéaire, elles ne bénéficiaient quasiment d’aucun écho. L’impératif national, telle une mâchoire solidement refermée, bloquait toute espèce de contradiction et de déviation par rapport au récit dominant. Les instances spécifiques de production de la connaissance sur le passé juif — les départements exclusivement consacrés à l’« histoire du peuple juif », séparés des départements d’histoire (appelée en Israël « histoire générale ») — ont largement contribué à cette curieuse hémiplégie. Même le débat, de caractère juridique, sur « qui est juif ? » n’a pas préoccupé ces historiens : pour eux, est juif tout descendant du peuple contraint à l’exil il y a deux mille ans.

    Ces chercheurs « autorisés » du passé ne participèrent pas non plus à la controverse des « nouveaux historiens », engagée à la fin des années 1980. La plupart des acteurs de ce débat public, en nombre limité, venaient d’autres disciplines ou bien d’horizons extra-universitaires : sociologues, orientalistes, linguistes, géographes, spécialistes en science politique, chercheurs en littérature, archéologues formulèrent des réflexions nouvelles sur le passé juif et sioniste. On comptait également dans leurs rangs des diplômés venus de l’étranger. Des « départements d’histoire juive » ne parvinrent, en revanche, que des échos craintifs et conservateurs, enrobés d’une rhétorique apologétique à base d’idées reçues.

    Le judaïsme, religion prosélyte

    Bref, en soixante ans, l’histoire nationale a très peu mûri, et elle n’évoluera vraisemblablement pas à brève échéance. Pourtant, les faits mis au jour par les recherches posent à tout historien honnête des questions surprenantes au premier abord, mais néanmoins fondamentales.

    La Bible peut-elle être considérée comme un livre d’histoire ? Les premiers historiens juifs modernes, comme Isaak Markus Jost ou Leopold Zunz, dans la première moitié du XIXe siècle, ne la percevaient pas ainsi : à leurs yeux, l’Ancien Testament se présentait comme un livre de théologie constitutif des communautés religieuses juives après la destruction du premier temple. Il a fallu attendre la seconde moitié du même siècle pour trouver des historiens, en premier lieu Heinrich Graetz, porteurs d’une vision « nationale » de la Bible : ils ont transformé le départ d’Abraham pour Canaan, la sortie d’Egypte ou encore le royaume unifié de David et Salomon en récits d’un passé authentiquement national. Les historiens sionistes n’ont cessé, depuis, de réitérer ces « vérités bibliques », devenues nourriture quotidienne de l’éducation nationale.

    Mais voilà qu’au cours des années 1980 la terre tremble, ébranlant ces mythes fondateurs. Les découvertes de la « nouvelle archéologie » contredisent la possibilité d’un grand exode au XIIIe siècle avant notre ère. De même, Moïse n’a pas pu faire sortir les Hébreux d’Egypte et les conduire vers la « terre promise » pour la bonne raison qu’à l’époque celle-ci... était aux mains des Egyptiens. On ne trouve d’ailleurs aucune trace d’une révolte d’esclaves dans l’empire des pharaons, ni d’une conquête rapide du pays de Canaan par un élément étranger.

    Il n’existe pas non plus de signe ou de souvenir du somptueux royaume de David et de Salomon. Les découvertes de la décennie écoulée montrent l’existence, à l’époque, de deux petits royaumes : Israël, le plus puissant, et Juda, la future Judée. Les habitants de cette dernière ne subirent pas non plus d’exil au VIe siècle avant notre ère : seules ses élites politiques et intellectuelles durent s’installer à Babylone. De cette rencontre décisive avec les cultes perses naîtra le monothéisme juif.

    L’exil de l’an 70 de notre ère a-t-il, lui, effectivement eu lieu ? Paradoxalement, cet « événement fondateur » dans l’histoire des Juifs, d’où la diaspora tire son origine, n’a pas donné lieu au moindre ouvrage de recherche. Et pour une raison bien prosaïque : les Romains n’ont jamais exilé de peuple sur tout le flanc oriental de la Méditerranée. A l’exception des prisonniers réduits en esclavage, les habitants de Judée continuèrent de vivre sur leurs terres, même après la destruction du second temple.

    Une partie d’entre eux se convertit au christianisme au IVe siècle, tandis que la grande majorité se rallia à l’islam lors de la conquête arabe au VIIe siècle. La plupart des penseurs sionistes n’en ignoraient rien : ainsi, Yitzhak Ben Zvi, futur président de l’Etat d’Israël, tout comme David Ben Gourion, fondateur de l’Etat, l’ont-ils écrit jusqu’en 1929, année de la grande révolte palestinienne. Tous deux mentionnent à plusieurs reprises le fait que les paysans de Palestine sont les descendants des habitants de l’antique Judée (2).

    A défaut d’un exil depuis la Palestine romanisée, d’où viennent les nombreux Juifs qui peuplent le pourtour de la Méditerranée dès l’Antiquité ? Derrière le rideau de l’historiographie nationale se cache une étonnante réalité historique. De la révolte des Maccabées, au IIe siècle avant notre ère, à la révolte de Bar-Kokhba, au IIe siècle après J.-C, le judaïsme fut la première religion prosélyte. Les Asmonéens avaient déjà converti de force les Iduméens du sud de la Judée et les Ituréens de Galilée, annexés au « peuple d’Israël ». Partant de ce royaume judéo-hellénique, le judaïsme essaima dans tout le Proche-Orient et sur le pourtour méditerranéen. Au premier siècle de notre ère apparut, dans l’actuel Kurdistan, le royaume juif d’Adiabène, qui ne sera pas le dernier royaume à se « judaïser » : d’autres en feront autant par la suite.

    Les écrits de Flavius Josèphe ne constituent pas le seul témoignage de l’ardeur prosélyte des Juifs. D’Horace à Sénèque, de Juvénal à Tacite, bien des écrivains latins en expriment la crainte. La Mishna et le Talmud (3) autorisent cette pratique de la conversion — même si, face à la pression montante du christianisme, les sages de la tradition talmudique exprimeront des réserves à son sujet.

    La victoire de la religion de Jésus, au début du IVe siècle, ne met pas fin à l’expansion du judaïsme, mais elle repousse le prosélytisme juif aux marges du monde culturel chrétien. Au Ve siècle apparaît ainsi, à l’emplacement de l’actuel Yémen, un royaume juif vigoureux du nom de Himyar, dont les descendants conserveront leur foi après la victoire de l’islam et jusqu’aux temps modernes. De même, les chroniqueurs arabes nous apprennent l’existence, au VIIe siècle, de tribus berbères judaïsées : face à la poussée arabe, qui atteint l’Afrique du Nord à la fin de ce même siècle, apparaît la figure légendaire de la reine juive Dihya el-Kahina, qui tenta de l’enrayer. Des Berbères judaïsés vont prendre part à la conquête de la péninsule Ibérique, et y poser les fondements de la symbiose particulière entre juifs et musulmans, caractéristique de la culture hispano-arabe.

    La conversion de masse la plus significative survient entre la mer Noire et la mer Caspienne : elle concerne l’immense royaume khazar, au VIIIe siècle. L’expansion du judaïsme, du Caucase à l’Ukraine actuelle, engendre de multiples communautés, que les invasions mongoles du XIIIe siècle refoulent en nombre vers l’est de l’Europe. Là, avec les Juifs venus des régions slaves du Sud et des actuels territoires allemands, elles poseront les bases de la grande culture yiddish (4).

    Ces récits des origines plurielles des Juifs figurent, de façon plus ou moins hésitante, dans l’historiographie sioniste jusque vers les années 1960 ; ils sont ensuite progressivement marginalisés avant de disparaître de la mémoire publique en Israël. Les conquérants de la cité de David, en 1967, se devaient d’être les descendants directs de son royaume mythique et non — à Dieu ne plaise ! — les héritiers de guerriers berbères ou de cavaliers khazars. Les Juifs font alors figure d’« ethnos » spécifique qui, après deux mille ans d’exil et d’errance, a fini par revenir à Jérusalem, sa capitale.

    Les tenants de ce récit linéaire et indivisible ne mobilisent pas uniquement l’enseignement de l’histoire : ils convoquent également la biologie. Depuis les années 1970, en Israël, une succession de recherches « scientifiques » s’efforce de démontrer, par tous les moyens, la proximité génétique des Juifs du monde entier. La « recherche sur les origines des populations » représente désormais un champ légitimé et populaire de la biologie moléculaire, tandis que le chromosome Y mâle s’est offert une place d’honneur aux côtés d’une Clio juive (5) dans une quête effrénée de l’unicité d’origine du « peuple élu ».

    Cette conception historique constitue la base de la politique identitaire de l’Etat d’Israël, et c’est bien là que le bât blesse ! Elle donne en effet lieu à une définition essentialiste et ethnocentriste du judaïsme, alimentant une ségrégation qui maintient à l’écart les Juifs des non-Juifs — Arabes comme immigrants russes ou travailleurs immigrés.

    Israël, soixante ans après sa fondation, refuse de se concevoir comme une république existant pour ses citoyens. Près d’un quart d’entre eux ne sont pas considérés comme des Juifs et, selon l’esprit de ses lois, cet Etat n’est pas le leur. En revanche, Israël se présente toujours comme l’Etat des Juifs du monde entier, même s’il ne s’agit plus de réfugiés persécutés, mais de citoyens de plein droit vivant en pleine égalité dans les pays où ils résident. Autrement dit, une ethnocratie sans frontières justifie la sévère discrimination qu’elle pratique à l’encontre d’une partie de ses citoyens en invoquant le mythe de la nation éternelle, reconstituée pour se rassembler sur la « terre de ses ancêtres ».

    Ecrire une histoire juive nouvelle, par-delà le prisme sioniste, n’est donc pas chose aisée. La lumière qui s’y brise se transforme en couleurs ethnocentristes appuyées. Or les Juifs ont toujours formé des communautés religieuses constituées, le plus souvent par conversion, dans diverses régions du monde : elles ne représentent donc pas un « ethnos » porteur d’une même origine unique et qui se serait déplacé au fil d’une errance de vingt siècles.

    Le développement de toute historiographie comme, plus généralement, le processus de la modernité passent un temps, on le sait, par l’invention de la nation. Celle-ci occupa des millions d’êtres humains au XIXe siècle et durant une partie du XXe. La fin de ce dernier a vu ces rêves commencer à se briser. Des chercheurs, en nombre croissant, analysent, dissèquent et déconstruisent les grands récits nationaux, et notamment les mythes de l’origine commune chers aux chroniques du passé. Les cauchemars identitaires d’hier feront place, demain, à d’autres rêves d’identité. A l’instar de toute personnalité faite d’identités fluides et variées, l’histoire est, elle aussi, une identité en mouvement.

    Shlomo Sand

    Historien, professeur à l’université de Tel-Aviv, auteur de Comment le peuple juif fut inventé, à paraître chez Fayard en septembre.

     

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  • Basta a guerra

     

    Basta a guerra

     

     

    Ce qui se passe actuellement à Gaza et en Israël est d'une extrême gravité. Il existe désormais un risque d'embrassement de toute la région du Proche Orient.

    Le Hamas a lancé le 7 octobre une opération d'envergure dans le sud d'Israël. Le résultat de cette action est effroyable. Plus de 1500 personnes ont été tuées, des milliers blessées et des dizaines enlevées et emmenées à Gaza. Une telle action visant essentiellement des civils est intolérable et doit être condamnée avec la plus grande fermeté. Disons-le avec force, cette opération n’a rien à voir avec un acte de résistance.

    Mais cet événement aussi dramatique qu'il soit ne doit pas cacher la forêt. C'est le résultat de 60 ans de politique de répression, d'apartheid et de colonisation forcenée menée par les différentes autorités politiques de l'Etat d'Israël. Politique exacerbée depuis le retour au pouvoir de Benjamin Netanyahou, homme corrompu, flanqué de sa clique d'éléments d'extrême droite.

    Il faut souligner au passage que cette politique a été soutenue, voire même applaudie par la majorité des pays occidentaux, dans le plus grand mépris des résolutions de l'Onu de 1967, lesquelles résolutions préconisaient, entre autres, la création de 2 états souverains.

    La riposte d'Israël ne s'est pas fait attendre. Violente, sans retenue. Depuis le 7 octobre la bande de Gaza subit d'intenses bombardements, avec pour conséquence la mort de milliers de personnes, des milliers de blessés, de destructions massives d'immeubles d'habitations et même d'un hôpital géré par Médecin sans frontière. Des troupes au sol s'apprêtent à pénétrer à Gaza. Un siège absolu a été installé tout autour de la zone de Gaza. Plus d’eau, d’électricité, de médicaments. Le pire est à craindre. On va vers une effroyable catastrophe humanitaire.

    A ce propos, Benjamin Netanyahou n'a pas donné dans la nuance. Il a tout simplement conseillé aux gazaouis de quitter leur territoire s'ils voulaient avoir la vie sauve. Version originale de « la valise ou le cercueil ». Cette déclaration intempestive relève de l'épuration ethnique pure et simple. Au demeurant, cette épuration a débuté dès 1948 et se poursuit dans les territoires occupés de Cisjordanie où des milliers de familles sont chassées de leurs terres, de leurs habitations au profit de colons, où des centaines de palestiniens sont tués ou blessés, chaque année.

    Le cycle de la violence doit impérativement cesser parce qu'il ne peut pas y avoir de solution militaire. Cette solution ne peut être que politique. A savoir l'application des résolutions de l'Onu de 1967. Ne pas aller dans cette direction, c'est s'exposer à des situations tragiques dont les peuples israéliens et palestiniens en feront les frais.

     

    Angelo Leonetti

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