• En finir avec la fausse alternance

     

    Ouvrir une perspective de vrai changement

    C’est un euphémisme que de dire que la situation économique et sociale de la Corse est difficile. Toutes les régions de France et européennes pourrait-on dire, s’enfoncent depuis longtemps et chaque jour un peu plus dans la crise du système capitaliste. Le chômage, les difficultés, la mal vie sont le lot quotidien de beaucoup aujourd’hui. Manca Alternativa/Ensemble posait en septembre dernier cette essentielle question : « comment résister à ce qu’on appelle la « droitisation » de la société française ». Les élections présidentielles et législatives du premier semestre 2017 en France seront peut-être l’occasion de commencer à inverser le cours des choses, à la condition, que les citoyens et les mouvements politiques se réclamant de la gauche de la transformation sociale et écologique et plus généralement d’une volonté d’émancipation, sachent s’unir réellement autour du seul candidat en capacité aujourd’hui de porter ce message : Jean Luc Mélenchon.

    Où en est la Corse ?

    En finir avec la fausse alternanceLa crise que connait la Corse, si elle se nourrit des mêmes causes que sur le continent français et européen,  ne revêt pas nécessairement, les mêmes formes que dans les autres régions. La Corse est une région attractive mais vieillissante. Le dernier recensement donne 325500 habitants[i]. C’est la région métropolitaine qui a bénéficié de la plus forte croissance, mais cette situation, résultat surtout d’une migration entamée en 2006, ne doit pas cacher une réalité sociologique et un déséquilibre démographique. Le vieillissement de la population régionale est une tendance de fond : la part des plus de 40[ii] ans qui s’élevait à 45,3% en 1975 est passée à 55,8% aujourd’hui. Les deux grosses agglomérations que sont Ajaccio et Bastia recensent plus de la moitié de la population insulaire, soit 60%, et quand on sait que l’île compte  360 communes sur son territoire, on imagine aisément le grave problème démographique dans de très nombreuses communes, surtout, celles de l’intérieur de l’Ile. Cette situation entraine nécessairement un isolement des personnes, un abandon des terres, des exploitations et une diminution des services publics pour ne prendre que ces quelques exemples.          

    La Corse fait face à une pénurie d’emplois technologiques, une absence de débouchés, un taux de chômage qui avoisine les 11%, une vie chère de plus en plus insupportable, des salaires inférieurs à la moyenne nationale.

    L’économie est fragile et encore aujourd’hui, notre île importe beaucoup plus qu’elle n’exporte, ce qui occasionne un PIB très en dessous de la moyenne nationale. Ce que l’on consomme en Corse on ne le produit pas nécessairement, il faut donc importer et c’est ainsi que la balance des échanges est largement déficitaire.

    La politique du tout tourisme a peu à peu et insidieusement conduit à une absence de repère,  un abandon de filières, un gâchis économique et environnemental, une absence de volonté.

    La politique agricole n’est pas plus une réussite et la part de l’agriculture dans l’économie se situe en dessous de la plupart des régions françaises. Elle ne représente qu’une part assez faible du PIB Corse et la population agricole reste en diminution constante, alors que la moyenne d’âge  des chefs d'exploitation est toujours très élevée. La politique agricole reste l’échec d’une profession qui vit marginalisée et sous perfusion de subventions européennes, comme nous l’avons démontré et débattu lors de l’initiative publique organisée à ce sujet par le comité de soutien JLM2017 le 6 décembre à Locu Théatrale à Ajaccio. 

    Le service public des transports maritimes a peu à peu été privatisé depuis mai 2006 et les services publics en général (santé, éducation, poste, énergie, …), quand ils ne sont pas contraints à de sérieuses coupes budgétaires, se trouvent malgré tout en incapacité d’assumer correctement leurs missions de service public.

    A cette crise économique, s’ajoute aussi ici une grave crise de confiance, une crise morale et  une crise civique. Le développement et l’enracinement plus qu’inquiétant du grand banditisme déstabilise la société insulaire. Ce développement de la grande délinquance, trouve depuis longtemps déjà un terrain favorable dans cette économie exsangue, dans l’économie  d’assistance et la politique clientéliste.

    La Corse vit aussi depuis plus de 40 ans dans une situation ou le cycle « Violence/Répression » entrave l’émergence d’une véritable citoyenneté. Il faut en sortir. Les violences politiques et la multitude d’attentats perpétrés en Corse depuis le début des années 70 ont participé de la  banalisation. Dans cette situation, les jeunes qui ont baigné et vécu dans cette violence quotidienne s’en trouvent être  les premières victimes. Ils en sont forcément et fortement marqués. Au-delà des drames et des séquelles que cette violence a occasionnés depuis quarante ans pour de nombreux jeunes et familles,  il faut voir l’impasse et surtout l’urgence à sortir de cette tenaille, ce cycle infernal, « Violence/Répression » dans lequel on nous  enferme depuis plusieurs décennies. La trêve, aujourd’hui, décrétée par le FLNC doit être l’occasion d’ouvrir de nouvelles perspectives pour la Corse et de s’attacher à développer et construire « une culture de la Paix ». Il y va de notre avenir à tous. Mais pour que cette trêve devienne véritablement effective, il faut ouvrir la voie du dialogue entre les différents acteurs. Rien ne se fera sans effort, persévérance  et sincérité.  L’état, ses responsables doivent montrer l’exemple et assumer leurs responsabilités. Le rapprochement des prisonniers, (de tous les prisonniers), y compris ceux condamnés pour des actions politiques doit être effectif et global. Il ne doit pas y avoir de demi-mesure et les détentions provisoires, abusives, prolongées doivent cesser. C’est au FLNC et ses dirigeants que doit revenir la responsabilité de dissoudre définitivement les groupes armés afin d’ouvrir une ère nouvelle, une période qui doit amener l’état et ses représentants à prendre des mesures de clémence, à favoriser des solutions négociées, d’apaisement et travailler à créer les conditions en dehors (des crimes de sang), d’une amnistie.

     La force du dialogue et de la raison doit primer sur la force des armes

    Cette question de la violence politique et donc de son arrêt doit faire l’objet d’un règlement politique négocié. Dans le contexte de violence généralisée à travers le monde, la Corse donnerait ainsi d’elle-même, une image de responsabilité, tout en créant les conditions du nécessaire rassemblement de ses forces vives pour lutter efficacement contre la crise du système capitaliste.

    Mais si la crise a comme partout, des particularités et spécificités locales, insulaires pour la Corse, les causes et les raisons de cette crise ne sont pas à rechercher dans une quelconque pseudo-colonisation de la Corse, mais plutôt dans la crise d’un système : le système capitaliste globalisé. C’est dans ce cadre et pour réfléchir aux propositions pour la Corse que deux réunions se sont tenues avec les animateurs nationaux du programme de Jean Luc Mélenchon. 

    Toute réflexion sur la situation actuelle, les solutions à avancer et les difficultés auxquelles les populations sont confrontées doivent partir de ce qui est à la racine des problèmes, le déséquilibre sociétal, l’exploitation organisée, l’affaiblissement des services publics, les droits mis à mal. Aujourd’hui les mouvements sociaux, en Corse comme partout ailleurs sont à la recherche de débouchés, de perspectives.

    Tirer les enseignements de l’histoire de la gauche

    Nous ne surprendrons personne en disant que la question des questions, celle qui préoccupe le plus et qui est au centre des réflexions, reste la question de l’union, ou ce qui revient au même, où allons-nous ? Comment en sortir ? Que faut-il faire ? Comment avancer ?

    Pour y répondre, il est indispensable de tirer les leçons complètes et sans complaisance de la période  qui s’est terminée….

    Nous sommes à gauche, et l’union de la gauche a marqué profondément l’histoire des luttes sociales en particulier au 20ème siècle. Mais il faut être conscient aujourd’hui de l’usure de ces notions. Nous vivons le spectacle d’un parti socialiste pratiquant tous les renoncements. La gauche du 21ème siècle ne sera pas celle du 20ème. Les 3 dernières décennies  resteront comme  celles de la déroute intellectuelle et morale d’une certaine gauche. L’union de la gauche au sens traditionnel du terme  est devenue aujourd’hui une caricature. Un simple outil de préservation électoral des appareils. Le Parti communiste est menacé d’effondrement, alors que le Parti socialiste s’est installé comme le champion du libéralisme, du social libéralisme.

    De nombreux mouvements sociaux, grèves, manifestations, ont  lieu mais tous ces mouvements restent cependant disparates et émiettés. Le souffle leur manque le plus souvent pour dépasser leurs luttes corporatives et l’efficacité  pour atteindre leurs objectifs.

    Ils buttent sur l’absence de débouchés politiques et le plus caractéristique reste l’attitude du gouvernement, son autoritarisme et la répression face aux salariés mobilisés contre la loi El Khomri. C’est ainsi qu’avec l’utilisation du 49/3 pour faire passer la loi en première lecture, une crise politique profonde se conjugue avec une grave crise sociale. Cette dramatique carence de perspectives pèse de façon pressente sur tout le mouvement social et surtout doit interpeller les mouvements qui se réclament de la transformation sociale. C’est un problème fondamental. Et c’est par ce prisme qu’il nous faut aussi analyser la seule candidature possible, celle de Jean Luc Mélenchon.

    Les promesses ont conduit une fois de plus aux désillusions.  Et dans ce climat de fin de règne, la droite prépare son retour et l’extrême droite est en embuscade. Ouvrir une perspective de vrai changement reste aujourd’hui la question des questions. Et il y a urgence.

    Plusieurs obstacles à vaincre :

    - En premier lieu, la croyance répandue encore aujourd’hui, qu’on ne peut éviter d’adapter le pays aux exigences du capital financier… politique que mettent en œuvre le Parti socialiste et que la droite veut encore plus amplifier. En fait, l’issue à la crise reste au centre même du combat de classe. La droite et le patronat veulent supprimer des acquis historiques des travailleurs et ramener le pays des décennies en arrière. Ils poursuivent pour cela un objectif fondamental, affaiblir les résistances…

    - En deuxième lieu, convaincre que seul Jean Luc Mélenchon est en position pour disputer un deuxième tour pour ces élections présidentielles. Même si nous ne partageons pas toutes ses idées et heureusement, (le pluralisme permet cela), il faut aller à l’essentiel. C’est ainsi qu’avec Manca Alternativa/Ensemble en Corse nous l’avions perçu dès le mois de mars 2016, en proposant de nous engager sans attendre derrière sa candidature. Nous pouvons regretter que le mouvement Ensemble au plan national ait dû attendre, comme pour le Parti communiste, le mois de novembre pour prendre sa décision.  

    En effet, unie et débarrassée de considérations politiciennes, la gauche de transformation sociale et écologique, peut renverser la table et changer la donne.

    Ce qui reste comme une évidence, c’est que les aspirations au changement n’ont pas disparu et qu’il existe encore assez de forces disponibles pour leur donner vie. Mais pour cela, il faut à gauche une construction résolument non politicienne, débarrassée des querelles partisanes.  Il nous faut être capable d’affirmer des ruptures radicales avec des modes de pensée et certains comportements. L’affirmation de sa propre identité politique n’a de sens que dans le respect des autres.

    La France Insoumise et dans notre île avec « la Corse Insoumise » nous devons nous engager résolument dans cette construction de type nouveau. Nous le ferons, si nous arrivons à élargir le rassemblement et permettre à chaque citoyen et  mouvement qui le souhaitent de trouver sa place dans ce rassemblement. Les présidentielles arrivent et les législatives se profilent. La Corse insoumise sera présente avec ses candidats et objet de discussion avec ses partenaires potentiels.   

    Jacques Casamarta, Francis Peretti

    1. Les populations légales 2013 entrent en vigueur le 1er janvier 2016. Doc  INSEE  http://www.insee.fr

    2. Article Le Monde.fr 26/11/2016

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