• Le mauvais calcul du FMI

    multiplicateur

    Voilà maintenant quatre ans que les économies occidentales sont en crise et Olivier Blanchard (l’un des plus grands économistes de la planète, dit-on,  en l’occurrence le directeur du département Recherche du Fonds Monétaire International) vient de publier un rapport accablant. Il avoue que le FMI - et avec lui, l’ensemble des dirigeants européens, ministres des finances, Banque centrale, Commission européenne… ont gravement sous-estimé les effets néfastes des politiques d’austérité infligées aux Etats les plus endettés et en premier lieu, la Grèce. Le rapport fait 43 pages rendu public le 3 janvier dernier.  Le FMI s’est trompé dans les grandes largeurs par une erreur de calcul sur le « multiplicateur », un coefficient bien connu des économistes…

    Le journal Marianne explique cette erreur : « Entre 1970 et 2007, les prévisionnistes du FMI avaient constaté que 1% de dépense publique en moins – ou d’impôt en plus – entraînait, en moyenne, 0,5% de croissance en moins dans les pays avancés. Soit un multiplicateur de 0,5, qu’ils ont doctement retenu dans les travaux préparatoires aux plans d’aide à la Grèce ou au Portugal. Mais ça, c’était avant la crise et son lot d’incertitudes qui perturbent le comportement des consommateurs Dans son « Panorama de l’économie mondiale » publié en octobre dernier, le FMI a d’abord reconnu, au détour d’une page repérée par les seuls spécialistes, que les multiplicateurs actuels pouvaient être compris « entre 0,9 et 1,7 ». C’est-à-dire entre deux et trois fois plus ! L’étude détaillée d’Olivier Blanchard confirme la bévue. Les conséquences sont abyssales : en obligeant les gouvernements d’Europe du Sud à réduire drastiquement les salaires des fonctionnaires et les pensions des retraités, le FMI a fait plonger la demande intérieure deux à trois fois plus vite que prévu ».

    Toutefois il n’y a pas besoin de grands multiplicateurs pour que les effets conjugués de l’austérité et de la baisse de croissance conduisent à la récession. Laissons les adversaires et les partisans de Keynes continuer à débattre à propos de l’effet multiplicateur de la variation du montant d'une dépense sur le revenu national ou l'activité économique générale. Quelles sont les conséquences : faillites, chômage et désordres sociaux dans les rues d’Athènes ou de Lisbonne. Et Marianne de conclure par un proverbe japonais, « si votre seul outil est un marteau, tout ressemble à un clou ». Il faut dire que le FMI est champion du coup de pioche dans l’eau.

    L’Hebdomadaire Marianne publie une étude détaillée sur cette erreur de calcul du FMI.  Un bon nombre d’économistes avaient pourtant tiré immédiatement la sonnette d’alarme sur les conséquences désastreuses de la politique d’austérité. La rigueur économique, c’est aussi de faire les bons choix et pas uniquement des restrictions budgétaires.

    Ceux qui sont à l’origine des difficultés économiques, non contents de cela, continuent à spéculer sur la crise pendant que le FMI préconise des politiques d’austérité sur des analyses erronées pour préserver les spéculateurs et leurs banques. Le  but est de pousser les Etats à l’austérité pour réduire les dettes engendrées par la spéculation. Pendant ce temps, les chevaliers de l’ultralibéralisme en profitent pour monter à l’assaut des acquis sociaux ou de ce qu’il en reste. Ils licencient pour aller exploiter les gens ailleurs. Ils s’exilent fiscalement. On aura compris que la politique d’austérité ne sert qu’à maintenir l’ultralibéralisme et la spéculation.

    Chaque fois que la banque centrale européenne prête aux banques privées, ce sont les noces de Canas (je suis tenté de dire de Carat) non pas par la multiplication des pains pour les pauvres mais par la multiplication des crédits et des intérêts qui fabriquent une monnaie de singe.  Si tous les emprunteurs voulaient rembourser les banques, il n’y aurait pas assez d’argent disponible pour le faire et il n’y en aurait plus en circulation. La dette ne peut jamais être complètement remboursée si ce n’est par de nouveaux emprunts. C’est un cercle vicieux, une spirale entretenue pour contrôler les ressources monétaires et les destinées des nations. Cela amène les gouvernants à quémander cette pseudo-monnaie que les organisations bancaires, qui ne produisent rien de tangible, fabrique. Ainsi ces dernières peuvent manipuler les décideurs politiques et les inciter à faire payer la dette aux contribuables et aux salariés. Il n’y a qu’un multiplicateur important pour les ultralibéraux et les banquiers, c’est celui de cette monnaie de singe créée à partir de l’argent des banques centrales et de la spéculation. Leur seul souci est de multiplier leurs bénéfices et leurs produits financiers.

    Aujourd’hui, le FMI reconnaît que les plans de rigueur menés depuis 2009 ont un impact bien plus lourd sur la croissance que ne le supposaient les prévisionnistes. On mesure toute la gravité de cet aveu. « Les multiplicateurs utilisés pour établir les prévisions de croissance sont systématiquement trop faibles depuis le début de la "Grande Récession"», reconnaît sans détour le chef économiste du FMI, Olivier Blanchard, dans une étude publiée par Marianne. Dans ce cas, que doivent faire les Etats ? Pour le FMI, l'assainissement des finances publiques doit se poursuivre en Europe. Mais tout est affaire de rythme. L'objectif des 3 % de déficit n’est donc plus d’actualité et, même Madame Lagarde le dit. La règle d’or budgétaire et même le pacte européen de stabilité et de croissance voté récemment sont des freins à la croissance mais restent la bible du FMI et d’Angela Merkel qui voudrait multiplier encore le nombre de chômeurs et d’emplois précaires. Un simple assouplissement de la règle d’or est envisagé. Plutôt que continuer à administrer aux peuples un  remède de cheval, la potion sera un peu moins forte et la posologie plus longue. Le médicament reste le même : l’austérité.

    Pidone

     

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