• Pour additionner mieux vaut ne pas soustraire

     

    Quelques remarques autour de J-L Mélenchon

    J’ai lu les analyses de Jean-Luc Mélenchon après le Brexit et après les élections espagnoles. J’ai lu son entretien sur Médiapart.

    1. Sur l’Europe, je perçois un désaccord ; je ne le crois pas insurmontable. JLM tient à son processus en deux temps : une négociation avec Bruxelles sur une refondation du cadre des traités (« plan A ») ; en cas d’échec des négociations, engagement d’un processus de sortie (plan B). La proposition est cohérente. Elle ne me convainc pas dans sa deuxième partie. Pourquoi ?
    • Parce que le point de départ doit être pour moi que le passage d’une Union (mal ficelée dès le départ) à pas d’Union du tout n’est pas souhaitable dans le monde qui est le nôtre. Aucun État européen séparé ne peut être potentiellement autre chose qu’une puissance de second ordre face aux USA et aux « émergents ». L’Union est une nécessité, mais telle qu’elle est, elle va dans le mur.
    • Une France démocratique userait des ressources de sa puissance autour d’une triple argumentation : exiger une refonte complète du dispositif des traités rompant avec la double norme de la concurrence et de la gouvernance (c’est l’Union elle-même qui se « sortir du carcan des traités ») ; affirmer que, comme le fit naguère le Royaume-Uni dans un sens ultralibéral, elle n’appliquerait aucune des dispositions des traités qui contrediraient la volonté souveraine du peuple français ; rappeler qu’une Union européenne sans la France serait un contre-sens, mettant de fait l’Union dans l’impossibilité de poursuivre.
    • Il n’y a pas besoin d’aller au-delà. À la limite, ce serait aux autres puissances de l’Union de décréter l’expulsion de la France. Au départ de la négociation, mieux vaut dire, tout à la fois, que nous ne voulons pas sortir de l’Union et que, dans tous les cas, nous n’accepterions pas que soit remis en cause le choix majoritaire des Français.
    • On peut maintenir une plage de désaccord sur le plan B. Ce désaccord peut être relativisé par le fait que la première phase n’est pas une affaire de quelques semaines, que les électeurs seront consultés avant l’entrée dans chacune des phases et que, sans attendre, un gouvernement vraiment à gauche amorcerait la mise en œuvre de sa politique, fût-ce en contredisant la lettre des actuels traités.
    1. Sur les élections législatives. Je n’aurais pas employé les formules de JLM qui résonnent comme une menace à l’égard des communistes. Je me serais contenté d’une affirmation simple et raisonnable : il y aura nécessairement cohérence entre la présidentielle et les législatives. Le rassemblement réalisé à chacune de ces élections peut prendre des configurations différentes, il peut être plus large dans certains cas que dans d’autres (et c’est tant mieux), mais son ossature sera la même dans chaque circonscription. On pourra très difficilement se trouver derrière des candidats différents en avril et derrière la même candidature en juin.

    Si les communistes se trouvaient engagés, pour la présidentielle, dans une option qui viendrait concurrencer le rassemblement esquissé par JLM, ils devraient anticiper le fait qu’ils auraient face à eux une candidature continuant le combat présidentiel.

    Je tiens pour ma part à l’utilisation du conditionnel et surtout pas du futur. Je ne veux pas envisager une seule seconde que celles et ceux qui se rassemblèrent en 2012 pourraient se disperser à nouveau en 2017. Que cela plaise ou non, on doit bien constater que le nom de JLM a montré sa capacité à regrouper dans des proportions intéressantes, même si une intention de vote n’est pas nécessairement sa réalisation. Mais en sens inverse, une non-intention d’aujourd’hui n’est pas nécessairement un non-vote de demain.

    1. Mieux vaut donc en rester à l’essentiel. Nous avons devant nous une fenêtre historique pour relancer la gauche dans la bonne direction. Pour y parvenir, nous devons aller bien au-delà de 2012. Mais ne commençons pas à soustraire avant d’avoir seulement additionné.

    À chaque organisation qui composa le Front de gauche de ne pas trop tarder à comprendre que le choix de JLM est le seul raisonnable, quand bien même on ne serait pas d’accord à 100 % avec ce qu’il dit (on a compris que c’est mon cas). Nul besoin, tout simplement, d’ériger chaque désaccord en barrière insurmontable, en motif de divorce : si nous avions procédé ainsi en 2012, comme nous l’avions fait en 2007, nous n’aurions pas réalisé la belle avancée qui fut la nôtre. Les uns et les autres, nous sommes les mêmes en 2017. Qu’est-ce donc qui pourrait sérieusement nous empêcher de nous retrouver aujourd’hui ?

    À Jean-Luc de son côté, de montrer que ses convictions et son désir légitime de clarté ne signifient pas qu’il n’entend pas la diversité de nos voix. Au départ, le Front de gauche eut le désavantage d’être avant tout un tête-à-tête entre le PCF et le nouveau PG. À mes yeux, il a trop gardé ce défaut. Mais les uns et les autres doivent comprendre que le Front de gauche, dans les pensées et les cœurs, ce fut bien autre chose, l’espérance de centaines de milliers d’individus qui n’étaient ni au PC ni au PG. Or on ne peut pas espérer gagner en lâchant la proie pour l’ombre, ni pour une improbable resucée de « gauche plurielle », ni pour un dialogue en direct entre un candidat et un peuple.

    Le Front de gauche a buté sur ses limites, mais son espérance est toujours là. Qu’on en prolonge l’existence de façon nouvelle, que l’on ne s’enferme pas dans la répétition est une chose ; qu’on lui tourne le dos en est une autre.

    Encore une fois, pour additionner mieux vaut ne pas soustraire. À régler des comptes entre nous, nous perdons notre raison d’être. Unis, nous pouvons. Désunis, nous sommes les jouets des flots.

    Pour additionner mieux vaut ne pas soustraireRoger Martelli

     

     

     

     

     

     

     

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  • Commentaires

    1
    Mina Corsa
    Jeudi 7 Juillet 2016 à 15:41
    Entièrement d'accord avec Martelli. Ajoutons nos forces, et sachons faire de nos différences des sources de richesses. Tant que nous préserverons nos valeurs essentielles, les fondements universels sur lesquels nous construisons notre avenir, notre démarche sera positive. Nous nous sommes trop perdus dans des chamailleries parfois même immatures, oubliant l'essentiel pour sacrifier au détail...et pendant ce temps là...:-((
    Indignés, rebelles...ajoutons nos forces et nos convictions!
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